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Cette rentrée culturelle sera la première depuis de très nombreuses années
sans la perspective, toujours réjouissante, d’une nouvelle exposition au Musée
Dapper de Paris. Créée sous la forme d’une fondation en 1983 par Michel
Leveau – ingénieur, chef d’entreprise et, surtout, collectionneur – et devenue
musée trois ans plus tard, cette institution siégeant depuis l’an 2000 au 35 bis
rue Paul Valéry à Paris aura été à l’origine d’une cinquantaine d’expositions,
dont la plupart ont fait date. Luba (1993-1994), Dogon (1994-1995), Femmes
dans les Art d’Afrique (2008-2009), Angola, fi gures de pouvoir (2010-2011)
ou encore la dernière en date, Chefs-d’oeuvre d’Afrique, ont donné la mesure
de la qualité des pièces présentées dans ces expositions – issues de la collection
du musée, mais pas uniquement – tout comme de la profondeur des interprétations
qui y ont été partagées avec le public.
Si le musée Dapper fut exemplaire dans les regards portés sur les arts traditionnels
d’Afrique, il fut absolument pionnier dans son engagement auprès
des artistes contemporains du continent africain, de la diapora et des Caraïbes, régulièrement mis
à l’honneur dans les salles du musée. Il va sans dire que cet espace de culture sera très regretté de
nous tous, mais il nous importe aussi de manifester notre enthousiasme à l’égard du projet d’avenir
de l’institution. Comme sa directrice, Christiane Falgayrettes-Leveau, nous l’avait annoncé lors de
l’entretien publié dans le numéro 78 (Hiver 2015) de ce magazine, les activités de la Fondation
Dapper vont s’orienter désormais de façon prioritaire – et ambitieuse ! – vers la sensibilisation aux
arts africains au sens large d’un nouveau public, en Afrique et dans les Caraïbes.
Ces efforts pour rendre accessible le patrimoine aux Africains sont nécessaires. Le collectionneur
d’origine tchadienne Clamra Célestin, à qui est consacré la rubrique « Personnalité » de cette édition,
en parle comme d’une priorité. Les raisons sociales et éthiques à cela sont évidentes, mais il
en va également des possibilités de développement du marché de l’art tribal ! Car l’éducation est
la porte d’entrée à la démarche de la collection, s’attache à souligner à bon escient Clamra... Un
grand travail attend la Fondation Dapper, nous lui adressons ici nos meilleurs voeux de succès et ne
manquerons pas d’en présenter les avancées à nos lecteurs.
Dans l’attente, nous conseillons déjà à ces derniers de tourner vite les pages de ce numéro et de
partir à la découverte, entre autres sujets abordés, des arts des îles de Mentawai, des collections
réunies par les missionaires de la Congrégation du Saint-Esprit au Gabon ou de la vision sur le
passé colonial de l’Australie et ses implications dans le présent du photographe Michael Cook.
Bonne lecture !
Elena Martínez-Jacquet
Éditorial
Notre couverture illustre un bouclier koraibi.
Saumanuk, Saeppu, Taileleu. Îles de
Mentawai. Début du XXe siècle.
Bois, peinture rouge et noire, coque de noix de coco.
H. : 113 cm.
Collection privée.
Photo : Brad Flowers.