LA CONGRÉGATION DU SAINT-ESPRIT ET L’AFRIQUE
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dentiels ou simplement disposée dans des vitrines
meublant les salles communes ou les couloirs des
communautés.
Dans les années 1980, les Spiritains redonnent
au musée toute sa valeur comme lieu d’accueil et
de présentation des collections, ce dont témoigne
la rénovation du musée de Langonnet. Après le
concile Vatican II, dans le contexte de la décolonisation,
le terme « propagande » apparaît désuet et
chargé d’une connotation trop conquérante pour
une Église qui se veut humble et en quête de dialogue.
« L’animation missionnaire » prend le relais,
dans une dynamique d’ouverture qui contribue à
renouveler le regard des Spiritains sur leurs collections
ethnographiques. Le musée devient un
espace de parole, où les missionnaires racontent
avec modestie et pragmatisme leur expérience et
leur connaissance des cultures africaines, où les
visiteurs sont invités à la discussion. Les collections
ne sont plus perçues comme des instruments de recrutement
ou de propagande ; elles nourrissent un
échange dans lequel chacun peut dire et interroger
son propre rapport au monde.
Cette démarche singulière n’est pas antinomique
avec une ouverture aux méthodes de l’anthropologie
moderne, qui porte sur les collections spiritaines
un regard à la fois différent et complémentaire.
À partir des années 2000, les liens tissés avec
ethnologues et historiens attestent d’une prise de
conscience de la part de la congrégation : celle de
sa responsabilité dans la conservation et la transmission
d’un patrimoine dont l’histoire l’a rendue
gardienne, mais qui, à bien des égards, lui échappe.
IV - LES COLLECTIONS SPIRITAINES,
TÉMOIGNAGES MÉCONNUS DES ARTS
ANCIENS D’AFRIQUE NOIRE
La vente d’une partie des collections spiritaines à la
fi n des années 1960 rend aujourd’hui complexe l’appréhension
du fonds dans sa globalité historique.
De nombreux objets ont rejoint à cette époque
de prestigieuses collections privées (Morris Pinto,
André Fourquet, Armand Charles, Alain Schoffel,
entre autres) et réapparaissent depuis sporadiquement
sur le marché ou dans des publications.
Parmi ceux-ci, plusieurs chefs-d’oeuvre. Citons
d’abord un rarissime tabouret caryatide lubahemba
(RDC) du « maître de Buli » – sans doute
l’exemplaire le plus abouti du corpus – collecté par
le père Henri Maurice en 1913 (fi g. 17). Notons