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FIG. 8 (À GAUCHE) : Détail
d’un bouclier koraibi fi gurant
deux chamanes discutant.
Bois, peinture, rotin et coque de noix
de coco. H. : 92,7 cm.
Collection de Stephen Binder et Kris
Estes, Lincoln, Ma.
Ex-coll. Groeneveldt, Utrecht, Pays-
Bas.
FIG. 9 (CI-DESSOUS) :
Panneau katoerei. Siberut
est. Vers 1900.
Bois, peinture noire. L. : 83 cm.
Museum der Kulturen, Bâle, inventaire
no. IIc 2636.
Scène de combat opposant des singes,
des chiens et des humains armés de
machette. Au centre se tient une fi gure
qui bien que portant un poignard ne
brandit pas d’arme. Selon les notes de
Paul Wirz, qui a collecté ce panneau
en 1926 dans une uma, il représente
une scène de chasse ou de chasse
aux têtes.
FIG. 10 (À GAUCHE) :
Assiette à repas lulak.
Réalisée par Koraibikerei
comme cadeau pour Reimar
Schefold. Sakuddei, 1968.
Bois, peinture noire. L. : 83 cm.
Taillée en forme de tortue, cette
assiette est ornée de peintures
décoratives fi gurant, entre autres
motifs, des singes, des tortues et
des varans.
mais la situation politique de l’archipel était délicate
et, de plus, j’ai appris que la production artistique
s’était essouffl ée. Finalement, c’est une religieuse
protestante, qui avait passé de nombreuses années
dans une mission allemande sur l’île de Nias au large
de Sumatra, qui m’a parlé de certaines îles avoisinantes
dont les habitants pratiquaient toujours la
chasse à l’arc et rejetaient toute infl uence extérieure.
Il s’agissait des îles Mentawai et c’était précisément
ce que je cherchais.
T. A. M. : Vous vous êtes donc lancé vers l’inconnu ?
Comment vous y êtes-vous pris ?
R. S. : Absolument ! J’ai tout simplement plié
bagage. J’ai fait envoyer dix-huit caisses depuis Bâle,
remplies de provisions de toute sorte, à la manière
des expéditions du XIXe siècle. Elles sont arrivées
sur la côte est, où se trouvaient une mission et mon
contact sur place, un homme très charmant nommé
Buchholz. Ce dernier me parla d’une tribu qui vivait
coupée du monde à l’intérieur des terres et avait
« accueilli » à coups de fl èches les représentants du
gouvernement indonésien qui souhaitaient l’approcher.
Finalement, nous avons navigué jusqu’à la
côte ouest et jeté l’ancre dans un minuscule village
où nous avons cherché à savoir s’il était possible de
pénétrer à l’intérieur des terres. On nous a dit que
ce serait diffi cile parce que les habitants refusaient
la moindre intrusion. Tout le monde avait peur de
s’y rendre. Néanmoins, un homme du village s’était
marié avec une femme du lieu et nous avons décidé
de l’envoyer en éclaireur afi n d’annoncer mon arrivée.
J’ai fi nalement atteint le village en question,
dominé par une énorme maison longue partagée par
de nombreuses familles.
Les plus jeunes n’avaient jamais vu d’Européens et
tous éprouvaient de la méfi ance. Il faut savoir qu’à
l’époque, le président Sukarno, qui cherchait à bâtir
une nation, estimait que toutes ces traditions tribales
appartenaient au passé. Il avait comme projet de
regrouper ces peuples traditionnels dans des villages
de construction récente où ils disposeraient de trois