ART ON VIEW
multiethnique et multilingue. Pour ce faire, un système
84
politique complexe s’est développé au cours
de la première moitié du XIXe siècle. Ce système
liait des villages individuels à la capitale Nsheng
par le transfert de personnes et l’affi chage de symboles.
Les oeuvres d’art remises aux dirigeants provinciaux
et les motifs que le royaume Kuba leur
permettait de porter sont cruciaux pour notre recherche.
Vu l’intérêt direct de l’État à l’égard de
l’affi chage symbolique de l’autorité à cette époque,
il est logique qu’il commande et défende de nouvelles
formes de motif lisible.
Au cours du XIXe siècle, le royaume Kuba
a continué à s’étendre pour devenir le pouvoir
régional dominant en raison de son contrôle sur
le commerce très lucratif de l’ivoire et du caoutchouc.
7 Toutefois, le nombre de représentants et
de bureaucrates professionnels augmentant avec
la richesse du royaume, en 1892, plus de la moitié
des hommes de la capitale étaient des membres
de l’aristocratie et la lutte pour le pouvoir et les
richesses était « tellement intense que le royaume
était « au bord d’une guerre civile à propos de la
succession royale. »8
C’est dans ce climat politique que s’est produite
la deuxième innovation majeure en matière de motifs.
Exemplifi ée par la surjupe brodée en vert (fi g.
1 et 12) cette époque est défi nie par une complexité
croissante, des contrastes de couleurs plus marqués
et l’incorporation de dessins secondaires dans des
schémas géométriques plus larges. Ces innovations
ont permis aux légions d’offi ciers de se distinguer
dans leur quête de domination sans effusion de
sang. En effet, au cours de cette période, les « manifestations
publiques de statut étaient les arènes
où rivalisaient les ambitions politiques réelles » et
les élites de la société organisaient régulièrement
« de grandes fêtes théâtrales où les gens se déguisaient
... et affi chaient leur richesse ».9
Bien entendu, impossible de parler de la politique
FIG. 28 (CI-DESSUS) :
« Bakuba. » Maison.
Photographie de Casimir
Zagourski (1880-1941).
Collection Pierre Loos. Avec l’aimable
autorisation d’Andres Moraga
Textile Art.