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mis. Dans ce cas, son intérêt était connu à la fois de
Tama Bulan et du beau-père de ce dernier, un autre
chef kayan nommé Lai’ing Anyi. En concertation
avec T. K. Balent Abun, le chef du culte de Bugan
Malan, il a été décidé que la figure, qui avait jadis
eu une importance rituelle pour le peuple de Rumah
Nyaving, l’« Umah Aging », serait remise à Harrisson
puisqu’elle n’avait pas été utilisée dans les rites
adat kian depuis 1933 (Harrisson 1964 : 157).
La petite figure en cire perdue était censée représenter
et incarner un ancêtre primordial connu
sous le nom d’Imun Ajo’ (plus ou moins prononcé
« Imum Jo » selon Harrisson). Il s’agit d’un homme
debout portant un pagne, une jarretière au sommet
des mollets, des bracelets et des brassards, et, plus
particulièrement une grande coiffe à bec. Le haut et
le bas de ses oreilles sont percés, le lobe étant étiré
par de nombreux anneaux. Ses bras sont proches
de sa poitrine et ses doigts sont recourbés, comme
s’il tenait un objet orienté à la verticale et désormais
absent. La moitié de son pied droit et son gros orteil
gauche manquent, mais il semble s’agir d’un défaut
de moulage plutôt que de dommages ultérieurs,
bien qu’une courbure au sommet du bec aviaire
puisse être la conséquence d’une chute de la pièce.
Harrisson connaissait déjà bien la mythologie
d’Imum Ajo’, dont le nom traditionnel complet est
Erang Imun Ajo’ Uyan ou, parfois dans un obscurcissement
intentionnel, Erang Imun Tawi Jakan.
D’après les entretiens d’Harrisson avec le susmentionné
T. K. Balent Abun et le dénommé Aki Lengio,
décrit comme « probablement le plus ancien Kayan
en vie », Imun Ajo’ était perçu comme la douzième
génération des « premiers hommes », peut-être les
FIG. 3 (CI-DESSOUS) :
Charles Hose, Sarawak: Tama
Bulan, a Native Kenyah
Chief, vers 1896.
Tirage au platine. 10,2 x 14,6 cm.
Wellcome collection, Wellcome Library,
réf. n° 30567i, n° 40 dans un album de
photographies de Sarawak.