FIG. 6 (CI-DESSUS) : Effigie
de dieu akua hulu manu.
Hawaï. Avant 1780.
Fibre, plumes, cheveux humains, nacre,
graines, dents de chien. H. : 62 cm.
The British Museum, Oc,HAW.78.
© The Trustees of the British Museum.
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D’autres oeuvres exposées sont devenues des trophées
récupérés qui mesurent les réussites des évangélistes
anglais de la London Missionary Society actifs
dans la région à partir de 1797. La conversion
des Maoris au christianisme est attestée dans des
oeuvres comme la sculpture de la Vierge à l’Enfant
en bois et coquillage de Patoromu Tamatea créée
autour de 1840 (fig. 10), où le statut de Marie est
indiqué par un ta moko ou marquage facial, généralement
réservé aux hommes de haut rang.
et les spectaculaires masques en carapace de tortue
des îles du détroit de Torrès.
« Encounter », le thème final, explore une série de
moments charnières ancrés dans les premières rencontres
indigènes qui ont ravagé les clans rivaux dans
les guerres entre les îles et les raids localisés qui cherchaient
à régler des conflits et rééquilibrer la balance
cosmologique. L’exploration scientifique durant le
Siècle des Lumières, qui a véritablement commencé
avec le premier voyage du capitaine Cook dans la
région du Pacifique en 1768, année de fondation de
la Royal Academy of Arts par Royal Charter, a lancé
une nouvelle période de rencontres entre les cultures
océaniennes bien implantées dans la région et les nations
européennes émergentes dont les navires à haut
mât s’aventuraient désormais sur la scène maritime
du Pacifique. Cette rencontre coloniale a bien entendu
eu une portée colossale et ses effets sont toujours
ressentis par les peuples indigènes à l’heure actuelle.
Elle a lancé une ère marquée tant par l’incompréhension,
la violence et la tragédie que par le partage et la
curiosité mutuelle de la « découverte ».
Deux cent cinquante ans plus tard, la dynamique
de pouvoir qui a motivé cette extraordinaire collision
entre deux mondes a été réinventée de manière
créative dans une installation vidéo, In Pursuit of
Venus Infected (2015-2017), par l’artiste maorie
de renom Lisa Reihana (fig. 5). Inspirée par une
fresque française du début du XIXe siècle, Reihana
a reconfiguré sa vision eurocentriste d’un paradis du
Pacifique très conciliant avec une série de vignettes
qui célèbrent l’agency et les connaissances coutumières
des insulaires actuels. Ces séquences intrigantes
évoquent et complexifient les rencontres quotidiennes
qui ont eu lieu sur les plages du Pacifique
au XVIIIe siècle entre les insulaires et l’équipage de
Cook. L’oeuvre, tissée de tension et dans un contexte
de menace de violence constante, est parsemée d’humour
et d’incidents, évoluant dans le drame pour
finir en tragédie.
Les oeuvres d’art du Pacifique restent un témoignage
essentiel pour l’Occident et les peuples
d’Océanie de cette époque extraordinaire faite
de rencontres. Avec sa vision expansive, Oceania
donne aux visiteurs un sens aigu des valeurs qui
ont été imposées au fil du temps à ces objets particulièrement
impressionnants. Ceux ramenés en
Angleterre par les premiers explorateurs comme
Cook ont rempli les étagères des cabinets du XVIIIe
siècle comme spécimens de curiosité intellectuelle.
OCEANIA