HOMMAGES
Mary (Polly) Nooter Roberts
1959–2018 LE MILIEU DE L’ART AFRICAIN a perdu
une grande spécialiste avec la disparition de
Mary Nooter Roberts en septembre 2018.
En cinquante-huit ans de vie, elle aura réussi
à accumuler de remarquables expériences
et réussites.
Le Dr Roberts, plus connue comme
« Polly », a travaillé avec acharnement
pour rendre accessible la compréhension de
l’art de l’Afrique à un large public, par le
biais de son enseignement, en dernier lieu
comme professeure d’arts et de cultures du
monde à l’UCLA, de ses publications (souvent
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le fruit d’un travail commun avec son
mari, le Dr Allen F. Roberts) et de son travail au sein de multiples
institutions muséales.
Dès son plus jeune âge elle fut familiarisée avec l’Afrique,
ayant vécu au Libéria avec ses parents. Son père, Robert, a
travaillé pour le service des affaires étrangères, puis pour la
Banque mondiale, dans différentes parties de l’Afrique. Sa
mère, Nancy Ingram Nooter, était anthropologue et artiste
plasticienne. Ses deux parents devinrent des collectionneurs
actifs d’art africain et demeurent toujours à Washington, D.C.
Polly avait étudié au Scripps College, se spécialisant en philosophie
et en littérature française. Après un voyage d’été pour
rendre visite à des parents en Tanzanie, elle commença des
études supérieures en histoire de l’art à la Columbia University.
Elle termina son doctorat en 1991, après deux années de
recherches sur le terrain auprès des Luba de la RDC. Au cours
de cette période, elle suivit une initiation Luba rigoureuse et,
cherchant à approfondir ses connaissances en matière de traditions,
travailla avec une femme devin. Plus tard, elle mena des
recherches sur le terrain au Sénégal, en se concentrant sur les
arts d’un mouvement soufi local.
Pendant son séjour à Columbia, Polly rencontra à la fois son
mari, Allen, alors professeur d’arts et de cultures du monde à
l’UCLA, et Susan Vogel, qui embaucha ensuite Polly comme
premier membre de l’équipe du tout nouveau Centre pour
l’art africain, alors situé dans l’Upper East Side à Manhattan.
Sa première exposition majeure, Secrecy: African Art That
Conceals and Reveals, fut montée en 1993 lorsque le centre
fut renommé Museum for African Art et transféré à Soho. Une
deuxième exposition novatrice du Museum for African Art,
Memory: Luba Art and the Making of History,
fut le fruit d’une collaboration avec
son mari en 1996.
En 1999, Polly et Al déménagèrent à Los
Angeles, où elle devint conservatrice en chef
du Fowler Museum à l’UCLA, dont elle fut
ensuite nommée directrice adjointe. Au
Fowler, elle fut commissaire de nombreuses
expositions, notamment : A Saint in the
City: Sufi Arts of Urban Senegal (2003)
ainsi que Continental Rifts: Contemporary
Time-Based Works in Africa (2009) et Inscribing
Meaning: Writing and Graphic Systems
in African Art (2011).
Polly commença une longue association avec le Los Angeles
County Museum of Art (LACMA) en 2008, organisant l’exposition
Tradition as Innovation in African Art. Elle fut embauchée
comme commissaire consultante au LACMA en 2011 et
continua à occuper ce poste. Elle lança un programme permanent
pour l’art africain au musée avec la remarquable exposition
Shaping Power: Luba Masterworks du MRAC en 2013,
avec des prêts très importants de Tervuren. Ensuite, elle travailla
avec Christine Kreamer du Smithsonian’s National Museum
of African Art, apportant l’exposition African Cosmos:
Stellar Arts (2014) à Los Angeles. Elle et Karen Milbourne,
également du National Museum of African Art, collaborèrent
à Senses of Time: Video and Film-Based Works of Africa, vue
simultanément au LACMA, au Smithsonian et au Wellin Museum
du Hamilton College (2015-17) .
L’année dernière, Polly a orchestré la magnifi que exposition
The Inner Eye: Vision and Transcendence in African Arts,
qui montre comment l’engagement visuel peut rendre possibles
des transitions entre les différentes étapes de la vie et
les interactions avec les mondes spirituels. Polly a également
eu un impact considérable sur la construction d’une collection
d’oeuvres africaines naissantes au LACMA, ajoutant des
oeuvres importantes à la collection, notamment un esprit de la
forêt Ijo majeur et une importante fi gure mère-enfant de l’association
Gwan du Mali, l’une des plus anciennes sculptures en
bois documentées d’Afrique sub-saharienne.
Au cours de sa vie, Polly a reçu plusieurs des plus hautes
distinctions de son domaine. En 2007, elle a été nommée Chevalier
de l’ordre des arts et lettres par la République française