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Mosaïques de plumes
de la rivière Keram
un art d’assemblage exceptionnel
En Nouvelle-Guinée, les plumes d’oiseau
ont toujours joué et jouent encore aujourd’hui
un rôle important dans les costumes de danse et les
parures. Dans la province du Sepik oriental, des costumes
de danse à plumes d’une complexité et d’une
hauteur extraordinaires ont été recensés au début du
XXe siècle dans des villages le long des rivières Keram
et Ramu, du lagon de Murik et de la baie de Hansa
(fi g. 2 et 4). Un autre usage cérémoniel d’ensembles
de mosaïques de plumes sur supports en bois existait
dans les villages le long de la rivière Keram et
fait l’objet de cette étude. Très peu d’informations
contextuelles ont été recueillies lors de la collecte de
ces assemblages, entre 1913 et 1936. Cependant,
des recherches récentes suggèrent que ces mosaïques
de plumes en forme de panneau étaient agencées en
assemblages à grande échelle dans les maisons des
hommes pour les cérémonies d’initiation masculine.
Objets puissants et très chargés, ces mosaïques
permettaient d’établir un pont entre le monde des
vivants et celui des ancêtres, une aide visuelle pour
accéder à des mythes et des histoires complexes qui
fournissaient la base spirituelle de l’éducation des
jeunes hommes. Bien que probablement liée, la fonction
exacte des mosaïques de plumes en forme de
pagaie produites dans la même région nous échappe
encore.
PREMIERS COLLECTEURS
En 1912 et 1913, la Kaiserin-Augusta-Fluss-Expedition
allemande menée par le géologue Artur Stollé
(1872-1934) explore et étudie en détail le fl euve Sepik
et ses affl uents (fi g. 3). L’anthropologue Richard
Thurnwald (1869-1954) rejoint l’expédition en janvier
1913 et se voit assigner le Töpferfl uss, connu aujourd’hui
sous le nom de rivière Keram, où il établit
son campement entre les villages de Bunaram (Bano)
et Ramunga (Arome) (fi g. 5). Dans le village de
Par Valentin Boissonnas
FIG. 1 (À GAUCHE) :
Détail de la fi gure 9.
FIG. 2 (CI-DESSUS) :
Danseurs masqués et
décorés de la région côtière
occidentale du Sepik. Photo
de Fr. Franz Kirschbaum.
Historical Photoarchive, Rautenstrauch-
Joest-Museum – Cultures of the World,
Cologne,
inv. 3352D.
FIG. 3 (À DROITE) :
Le Sepik inférieur et la rivière
Keram avec quelques-uns
des villages mentionnés
dans le texte de cet article.
Les archives font état de
mosaïques qui auraient été
collectées dans les villages
d’Angarep, de Gabumonum,
Garep, Tyburum et
Tyamboto, mais leur situation
n’est plus connue.
Carte © V. Boissonnas.
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