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FIG. 27 (CI-DESSOUS) :
Quatre danseurs masqués
probablement représentant
des esprits entourés de
villageois lors d’un spectacle
au village de Kambot.
Historical Photoarchive, Rautenstrauch-
Joest-Museum – Cultures of the World,
Cologne, inv. 3357D.
DOSSIER
mythologiques y sont représentées entourées de lézards
et de ce qui pourrait être interprété comme des
tambours kundu. À gauche et à droite de ce panneau,
des mosaïques de plumes sont aussi fi xées au
mur. La première rangée montre quatre panneaux de
mosaïques avec de grands visages d’esprits. La rangée
supérieure consiste en des panneaux plus petits
avec un visage alors que le reste est décoré de formes
géométriques. Malgré leur petite taille, il est clair
que ceux-ci sont aussi de type panneaux.
Les mosaïques de plumes en forme de pagaie (fi g.
17-22) n’ont pas été conçues pour être pendues au
mur car elles n’ont pas de système de suspension.
Les plumes couvrent toute la circonférence du bâton
rond supérieur et ce n’est que dans cette zone
que les plumes rouges de perroquet
sont incluses dans les mosaïques. Vu
la nature chargée de cette couleur
dans les sociétés néoguinéennes, on
peut être amené à croire qu’on les
tenait à cet endroit durant les cérémonies.
Contrairement à la plupart
des mosaïques en forme de panneau
qui étaient décorées de plumes sur
toute leur longueur, les dix derniers
centimètres des mosaïques en forme
de pagaie ne sont jamais couverts.
Le fait que le bois du bout de ces pagaies
soit souvent écrasé et que l’on
puisse y trouver des résidus de boue
indique que les mosaïques en forme
de pagaie étaient utilisées en dehors
de la maison des hommes, parfois
posées sur le sol. Quand la nouvelle
exposition du Musée ethnologique
de Berlin a ouvert ses portes en
1926, une vitrine montrait un danseur keram masqué
avec une mosaïque en forme de pagaie coincé
sous chaque bras (Schindlbeck 2012 : 41, fi g. 10).
Un rapprochement pourrait exister avec les danseurs
damur du Ramu inférieur qui dansaient avec
une paire de bâtons (Smidt und Eoe 1999 : 121).
La diversité de longueurs des mosaïques en forme
de pagaie pourrait indiquer qu’elles étaient conçues
pour des danseurs individuels. Vu qu’autant d’entre
elles ont été collectées, il n’est pas improbable
qu’elles aient été utilisées par paires. Thurnwald
a collecté ce type de mosaïques dans les villages
d’Angarep, de Gorogopa, Gabumonum, Tuyburum,
Tyamboto, Garep et Kambaramba.
Les mosaïques de plumes en forme de pagaie
ont une grande affi nité visuelle avec des lances de
cérémonie appelées karkar utilisées dans le lagon de
Murik. Elles représentent les enfants de la mère fondatrice,
Areke (Somare 1974 : 32). La lame pointue
du karkar a une forme identique aux mosaïques en
forme de pagaie, mais est sculptée en relief et peinte.
Au sommet de la lame, un visage d’esprit est représenté,
le reste de lame est sculpté en formes géométriques,
sauf les dix derniers centimètres, comme les
mosaïques en forme de pagaie. Le manche au-dessus
de la lame est également couvert de mosaïques de
plumes qui incluent des plumes rouges de perroquet
ou, comme les exemplaires de la collection du Steyl
Missiemuseum, des morceaux de tissu rouge. Les
karkars recevaient le nom d’un esprit et étaient associés
à la guerre et à la destruction d’ennemis (Peltier
2015 : Kat. 109). Ils étaient de puissants artefacts
qui n’étaient pas affi chés en public, mais soigneusement
conservés avec d’autres éléments sacrés dans
la maison des hommes. Très peu d’entre eux ont été
vendus à des collectionneurs, car ils sont déterminants
pour le bien-être du clan.
CONCLUSIONS
Les mosaïques de plumes de la rivière Keram n’ont
jusqu’ici été que peu abordées dans la littérature.
Ceci est sans doute dû à leur rareté et au peu d’informations
rassemblées par les collecteurs sur le terrain