MOSAÏQUES DE PLUMES
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au début du XXe siècle. Après avoir été entreposés
pendant plus d’un siècle dans les musées d’Europe et
d’Australie, la plupart des exemplaires sont devenus
particulièrement fragiles et beaucoup d’entre eux
ont été endommagés.
Cette étude a identifi é deux types de mosaïques de
plumes, soit en forme de panneau, soit en forme de
pagaie. Les mosaïques en forme de panneau étaient
utilisées pour les cérémonies d’initiation des jeunes
hommes dans les maisons des hommes, où elles
étaient assemblées en mosaïques à grande échelle qui
couvraient tout ou une partie du mur du fond. À la
manière des façades sculptées et peintes des églises
d’Europe médiévale, ces mosaïques de plumes représentent
des images sacrées illustrant des histoires et
mythes sur lesquels se basait l’éducation spirituelle
des jeunes hommes.
Les mosaïques de plumes en forme de pagaie sont
des assemblages en trois dimensions qui n’étaient pas
faits pour être accrochés au mur. Les traces d’usure
indiquent un usage extérieur, potentiellement en lien
avec les danses masquées. Ces danses auraient eu
lieu devant la maison des hommes et étaient probablement
admirées par toute la communauté (fi g. 27).
Ces mosaïques en forme de pagaie ne disposent
pas des motifs fi guratifs complexes des panneaux
d’initiation et leur ressemblance frappante avec les
karkars, les lances de cérémonie du lagon de Murik,
pourrait suggérer qu’elles étaient utilisées dans des
préparations similaires à la guerre.
En 1913, l’anthropologue Richard Thurnwald troquait
facilement les mosaïques de plumes contre des
outils en métal que des visiteurs précédents avaient
déjà fait connaître aux villageois. La vaste quantité
de mosaïques échangées dans une très courte
période indique qu’à cette époque elles n’étaient
plus considérées comme inaliénables et pouvaient
être échangées comme des marchandises. Sous l’infl
uence grandissante des missionnaires chrétiens, les
mosaïques de plumes restantes ont été vendues ou
jetées. Contrairement à la sculpture sur bois et la poterie,
les compétences et connaissances spécialisées
nécessaires à la création de mosaïques de plumes ont
complètement disparu. Bien que les mosaïques de
plumes demeurent encore dans la mémoire collective
des villages du Keram, aucune n’a été produite
depuis plusieurs générations.
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