DOSSIER
102
que les fi gures, les masques refl ètent également la
diversité interne qui caractérise la culture dans son
ensemble, ce qui laisse penser que des styles distincts
sont représentatifs de sous-groupes, pour ne pas dire
même de certains ateliers et de leurs artistes les plus
en vue.
Témoignant des limites des dénominations ethniques
et illustrant les affi nités entre l’art des Luluwa
et celui de leurs voisins proches, mais peu étudiés, les
Luba-Kasaï et les Luntu, ma monographie comprend
des images d’une demi-douzaine d’oeuvres dont la
paternité ne peut être confi rmée. Si une certaine subjectivité
se cache derrière le choix de chacune de ces
illustrations, cette observation concerne manifestement
les oeuvres des cultures périphériques, caractérisées
par des styles souvent mixtes et indéfi nis. Une
jolie sculpture qui devait fi gurer dans mon livre afi n
d’illustrer cette notion de périphérie, mais qui a été
accidentellement laissée de côté lors de la mise en
page, est une demi-fi gure qui apparaissait dans mon
exposition Art et pouvoir dans la savane d’Afrique
centrale en 2008 (fi g. 2). Hormis les risques d’erreur
humaine, ma monographie, comme toute entreprise
de ce genre, ne peut qu’entrevoir le statut d’encyclopédie.
Outre le choix des objets présentés, mon travail
se révèle également subjectif par rapport à l’analyse
des sources littéraires et autres sur lesquelles j’ai
fondé mon interprétation et ma compréhension des
choses. Si j’ai commis des erreurs ou mal compris
les travaux de mes confrères, j’en assume l’entière
responsabilité et je suis ouvert à toute remarque et
critique.
Luluwa : Art d’Afrique centrale entre ciel et terre
est scindé en six chapitres. L’introduction aborde
certaines des restrictions imposées par les collections
et la littérature, comme évoqué ci-dessus, et
souligne la rareté et l’insuffi sance des études approfondies
sur le sujet. Parmi les études de terrain plus
récentes réalisées par des experts congolais, seules
quelques-unes se sont concentrées sur l’art. Par ailleurs,
en raison de l’importante diversité culturelle
régnant dans la vaste région luluwa, il s’avère diffi
cile de généraliser et dangereux d’appliquer des
résultats obtenus pour une période donnée à des
objets acquis pendant une autre. En effet, la plupart
des collections ont été établies à la fi n du XIXe
siècle et au début du XXe siècle, alors que les principales
recherches sur le terrain ont été menées entre
la moitié et la fi n du XXe siècle. Le chapitre introductif
dévoile également certaines questions d’ordre
FIG. 6 (À DROITE) :
Figure masculine bwanga
bwa bukalenga.
Luluwa, RDC.
Bois, pigments. H. : 56,6 cm.
Collectée sur le terrain par Paul Le
Marinel, Belgique, c. 1885.
Ex-coll. Guillaume De Hondt,
Bruxelles, Belgique, avant 1937 ;
Jacques Kerchache, Paris, France ;
collection privée, France ; Alain de
Monbrison, Paris, France ; James J.
Ross, États-Unis.
Collection de Laura Ross, USA.
Photo : © John Bigelow Taylor, New
York.
L’un des premiers objets du genre
à avoir été collectés, cette célèbre
fi gure, dont les attributs sculptés
laissent penser qu’elle représente
un chef de haut rang de l’ordre
du léopard, a été exposée pour la
première fois en Occident lors de
l’exposition Kongo-Kunst supervisée
par Frans Olbrechts et organisée à
Anvers en 1937.