DOSSIER
Les premiers groupes groupes d’objets
Berlin ont été réceptionnés par le musée en avril et
en novembre 1899 et comprenaient quelques oeuvres
d’exception. Un grand nombre d’entre elles ont fait
partie des pièces maîtresses des expositions permanentes
d’abord à son emplacement d’origine (fi g. 1 et 2) à
côté de l’actuel Martin-Gropius Bau, puis dans ses
bâtiments situés dans le quartier périphérique de
Dahlem. Ces installations n’ont cessé de changer,
jusqu’à la fermeture du site de Dalhem en janvier
2017, au rythme de l’évolution du regard occidental
nombre des objets bangwa de la collection gardera
une place de choix dans l’offre muséale de l’établis-
LA COLLECTION
BANGWA
Formée par Gustav Conrau
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FIG. 1 (CI-DESSOUS) :
Le Königliches Museum
für Völkerkunde au 120
Königgrätzer Strasse
(l’actuelle Stresemann
Strasse) à Prinz-Albrecht-
Strasse (l’actuelle
Niederkirchner Strasse),
Berlin.
Carte postale publiée par L. Saalfeld,
Berlin, #261, c. 1900.
FIG. 2 (PAGE DE DROITE
À GAUCHE) : Le Lichthof
du Königliches Museum für
Völkerkunde, Berlin.
Gravure d’après C. Stöving.
Extrait de Die Gartenlaube, Ernst Keil’s
Nachfolger, Leipzig, 1887, p. 549.
FIG. 3 (PAGE DE DROITE) :
Figure commémorative
d’un père de jumeaux aini.
Bangwa, Cameroun. XIXe
siècle.
Bois. H. : 89 cm.
Collectée par Gustav Conrau, 1898
ou 1899.
Museum für Völkerkunde, Berlin,
inv. III C 10521.
Photo : Martin Franken.
© Ethnologisches Museum der
Staatlichen Museen zu Berlin -
Preußischer Kulturbesitz.
aux côtés d’une mannequin (fi g. 7). Walker Evans
fi t de cette statue une photo moins sensible pour le
portfolio d’African Negro Art, au MoMA de New
York, en 1935 (fi g. 8). Même des artistes camerounais
contemporains font référence, dans leurs propres
oeuvres3, à cette sculpture emblématique, aujourd’hui
connue sous le nom de « Reine Bangwa ».
Ces premiers objets bangwa à intégrer la collection
de Berlin ont été acquis dans les hauts plateaux du
Cameroun puis envoyés en Allemagne, où ils été appréciés
immédiatement. Au cours du développement
de l’histoire de l’art en Occident, marqué d’ailleurs
par certains de ces objets, le nom de celui qui les avait
collectés au Cameroun, Gustav Conrau (fi g. 11), a lui
aussi connu une notoriété croissante. Conrau est né
le 2 octobre 1865 à Priemern, non loin de Seehausen,
dans la région allemande de l’Altmark. Fils du gardechasse
du village, Conrau aurait suivi une formation
de marchand et fréquenté une école coloniale le préparant
à une carrière en Afrique, qui débuta au Cameroun
en 18904 et dont l’histoire est contée ci-après.
NOUVELLES DÉCOUVERTES
J’ai récemment mis la main sur deux lettres écrites
par Conrau au géologue Kurt Hassert (fi g. 10), dont
le fonds littéraire est conservé dans les Archives
centrales de Leipzig (fi g. 12 et 13)5. Les lettres commencent
par « Cher ami ! » et sont datées respectivement
du 16 juillet 1898 et du 12 juin 1899. Jamais
prises en compte dans l’étude du parcours de Conrau,
ces missives m’ont incitée à me pencher à nouveau sur
le travail de collecteur sur le terrain de l’Allemand.
L’analyse de ces sources nouvelles ainsi que le réexamen
des sources existantes permettent d’éclaircir les
activités de Conrau dans l’arrière-pays du Cameroun
pendant la dernière décennie du XIXe siècle.
bangwa arrivés au Museum für Völkerkunde de
du musée allemand durant plus d’un siècle,
sur cet « art venu de loin ». Nul doute que bon
sement lorsque celui-ci rouvrira ses portes en 2019,
dans ses nouveaux locaux du Humboldt Forum,
dans le centre historique de Berlin. Publiés maintes
fois, beaucoup de ces objets sont intimement liés à
la révolution esthétique du début du XXe siècle, plus
précisément à l’avènement du cubisme et de l’expressionnisme.
Quelques-unes de ces oeuvres anciennes
ont été perdues avec le temps1. Cinq sculptures ont
quitté le musée au milieu et à la fi n des années 1920
et se trouvent aujourd’hui dans des collections privées
ou muséales2. Une fi gure féminine particulièrement
expressive (fi g. 4) et son « partenaire » masculin
(fi g. 6) font partie de ces objets retirés de l’inventaire,
qui sont apparus sur le marché de l’art en 1926 par
l’entremise du collectionneur et marchand berlinois
Arthur Speyer. L’analyse de leur parcours depuis lors
indique que ces deux fi gures ont changé de propriétaire
à plusieurs reprises. Man Ray a photographié
la fi gure féminine dansante dans des ombres ovales,
ainsi que dans le cadre d’une composition surréaliste
Par Bettina von Lintig