MUSÉE À LA UNE
FIG. 5 (CI-DESSUS) :
Figurine. Vanuatu XIXe siècle.
Fibres végétales et terre.
Musée royal de l’Afrique centrale,
EO.1979.1.1428.
FIG. 6 (À DROITE) : Manche
de chasse-mouche. Îles Cook
XIXe siècle.
Bois.
Musées royaux d’Art et d’Histoire,
ET. 48.9.
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européens étaient encore imprégnés de l’idée que
les Insulaires, dont la culture matérielle paraissait
pauvre, sans l’usage du métal ni de la poterie,
méconnaissant la roue, vivaient à un stade que nos
sociétés avaient connu aux époques préhistoriques.
Selon cette naïveté qui prétendait que, partout dans
le monde, les groupes humains passaient obligatoirement
par les mêmes stades, on pensait également
que les Océaniens étaient fi gés dans une sorte de stagnation.
Ce qu’on pouvait observer de leurs moeurs
et de leurs traditions n’était-il pas le refl et ce qu’ils
avaient toujours été, passé et présent devenant équivalents
? Hélas, ce sentiment a longtemps persisté,
ce qui produisit fréquemment un usage erroné des
données ethnographiques, les observations sur les
vivants servant aussi à caractériser leur histoire.
C’est oublier qu’il n’est aucune société qui ne modifi
e sans cesse ses discours au gré des générations, le
présent étant seulement un instantané de ce mouvement,
et non le refl et intangible du passé.
Inconsciemment, on a donc nié l’histoire de
l’Océanie, se contentant d’une approche ethnographique,
c’est-à-dire d’une description des traditions
des groupes rencontrés. Dans cette région du
monde, les véritables analyses ethnologiques, au
sens de tentatives de compréhension des contenus
culturels, sont apparues plus tardivement. Le point
de départ fut sans doute les travaux novateurs de
Bronisław Malinowski, qui eut l’occasion de séjourner
pendant la Première Guerre mondiale dans
les îles Trobriand (Papouasie-Nouvelle-Guinée).
Quant aux fouilles archéologiques, elles sont plus
récentes encore et n’ont pris de l’ampleur que dans
la seconde moitié du XXe siècle. L’histoire de l’Océanie
est donc un sujet d’actualité, dont on entame à
peine l’étude, même si depuis quelques décennies les
recherches se multiplient enfi n.
Par ailleurs, les explorateurs ont rapporté, dès
le XVIIIe siècle, des objets océaniens en Europe,
trésors qui ont suscité un grand intérêt. Immédiatement,
ceux qui tenaient des cabinets de curiosités
– ainsi qu’on appelait les collections privées à
cette époque – ont voulu en acquérir et un commerce
s’est très tôt établi, provoquant parfois des
manufactures seulement destinées à assouvir les demandes
étrangères. Une large part de nos connaissances
des productions océaniennes est basée sur
ces artefacts qui racontent tout autant la rencontre
avec le monde extérieur que les traditions anciennes
des îles du Pacifi que. Ce phénomène explique l’assez