STEVEN MICHAAN
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enchères, j’ai principalement traité avec Christie’s et
Sotheby’s. Cela dit, l’un de mes plus beaux souvenirs
de collectionneur est lié, tout naturellement, à l’une
des pièces les plus importantes de ma collection :
un casque de guerre tlingit, qui était proposé en
2008 par Fairfield Auctions, une petite maison
de vente située à Monroe, dans le Connecticut. À
l’époque, je n’avais pas beaucoup de moyens, mais
lorsque ce casque a été mis aux enchères après un
premier passage sur eBay, j’ai su qu’il me le fallait
absolument, peu importait son prix. Je me suis
dit que je trouverais bien un moyen de le payer –
et j’ai trouvé. Les enchères ont été extrêmement
disputées, mais finalement j’ai fait la meilleure
offre, un montant qui marqua un record pour une
pièce d’art amérindienne. Ce casque de guerre reste
probablement mon plus beau trophée.
Très rares, les objets de ce type sont antérieurs
aux premiers contacts des populations de la Côte
nord-ouest avec les Européens. Seuls quatre-vingtdix
exemplaires sont connus, dont la majorité se
trouve dans des musées. La pièce que je possède
remonte au début du XIXe siècle et a probablement
été utilisée pendant un conflit bien connu qui
éclata aux alentours de 1804 – et que l’on nomme
aujourd’hui la « Bataille de Sitka » – au cours
duquel les Tlingit ont repoussé l’assaut de colons
russes (voir Tribal Art magazine, printemps 2006,
p. 184). Si ce casque n’est sans doute pas l’objet
le plus subtilement ouvragé de ma collection
– comparé à d’autres pièces comme la massue de
chef tsimshian, le propulseur (atlatl) tlingit ou le bol
en forme de loutre quatsino –, l’importance qu’il
revêt à mes yeux réside dans son extrême rareté et
son rôle majeur dans l’histoire du peuple Tlingit.
T. A. M. : Vous avez produit un somptueux
ouvrage en trois volumes qui documente l’essentiel
de la collection. On imagine aisément le temps et
l’argent que vous avez dû y consacrer. Qu’est-ce qui
vous a poussé à vous lancer dans ce projet ?
S. M. : J’avais déjà autopublié un livre dédié à ma
collection de leurres de pêche, intitué American
Fish Decoy et paru en 2005, donc j’avais un
peu d’expérience en la matière. Comme ma
collection d’art tribal était pratiquement terminée,
j’avais envie d’y consacrer un livre également.
C’était l’occasion de partager ces objets avec la
communauté des collectionneurs et je souhaitais
créer une archive de mes fonds. Je voulais la