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un homme âgé de vingt-huit à trente ans41, au visage
intelligent, aux mains et aux pieds soignés et animé
d’une certaine bonne humeur. Lorsqu’il s’assit sur un
trône, Conrau demanda à s’asseoir lui aussi. Les domestiques
du chef lui présentèrent une pipe élaborée,
dont le tuyau était décoré de perles raffi nées, tandis
que le fourneau en laiton représentait une tête d’éléphant
à quatre défenses. Le chef expliqua à Conrau
qu’il était la seule personne habilitée à posséder une
tête d’éléphant à quatre défenses, ce qui provoqua
les applaudissements du public. Conrau demanda
s’il pouvait avoir une pipe identique à celle que le
chef était en train de fumer. Le chef lui répondit qu’il
pouvait avoir celle-là et qu’il en ferait fabriquer une
autre pour lui-même. Conrau savait qu’il était à pré-
FIG. 14 (À GAUCHE) :
Poteau surmonté d’un
personnage masculin.
Bangwa, Cameroun.
XIXe siècle.
Bois. H. : 97 cm.
Collecté par Gustav Conrau, 1898
ou 1899.
Museum für Völkerkunde, Berlin,
inv. III C 10546.
Photo : Martin Franken.
© Ethnologisches Museum der
Staatlichen Museen zu Berlin -
Preußischer Kulturbesitz.
FIG. 15 (EN BAS) :
Eugen Zintgraff. Vers 1899.
Gravure extraite de Jahrbuch der
Berliner Morgenzeitung, Kalender
1899, p. 287.
FIG. 16 (À DROITE) :
Bien qu’étant légendée
comme « Graf Pückler (x),
Hetebrügge, Hauptman
Ramsay, der Hauptling von
Bali », cette photo présente
en réalité, de gauche à
droite : Gustav Conrau, un
homme non-identifi é, Eugen
Zintgraff et Galega Ier, fon
de Bali, ouest de Bamenda,
Cameroun. Si cette
identifi cation est correcte, la
photo daterait de 1896.
Extrait de Globus, 85, 1904, p. 201,
fi g. 6.
sent tenu d’offrir au chef un cadeau aussi important
en retour, comme il l’écrivit à von Luschan le 18
février 189942. Conrau envoya ensuite cette magnifi
que pipe à von Luschan. Elle se trouve encore aujourd’hui
dans la collection ethnologique de Berlin
(fi g. 29). Conrau écrivit : « Le chef m’a également
promis qu’il fabriquerait beaucoup de choses pour
moi (des sièges, etc.) si je lui fournissais les perles
qu’il ne pouvait pas se procurer au Cameroun.43 »
Les perles en question étaient du même type que
celles qui ornaient le tuyau de sa pipe, à savoir des
perles de verre extrêmement raffi nées. L’on découvrira
ultérieurement que les objets bangwa en laiton
étaient en réalité importés de Bagam44, tandis que le
travail de la perle s’effectuait dans la région bangwa.
Le chef ne voulait pas autoriser Conrau à se rendre
à Bagam : « Malheureusement, je ne pouvais pas me
rendre à Bagam d’ici … Lorsque j’ai émis le désir
d’y aller, on m’a presque assassiné.45 » Conrau informa
von Luschan que les objets en fer, notamment