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K. G. : Vous l’aurez compris, IncarNations soulève
des questions plus qu’elle ne veut apporter
des réponses. En ce sens, je ne vais pas commettre
l’imprudence ici de vous livrer une quelconque
défi nition de ce qu’est l’art africain pour moi.
Permettez-moi simplement de dire que ce qui le
rend si puissant, c’est que lorsqu’on regarde une
oeuvre d’art africaine, elle vous regarde directement
en retour – parce qu’elle est vivante, et dotée
d’un esprit.
représentative d’un continent, car nous ne commettrons
pas cette erreur trop souvent répétée de
prétendre parler pour cinquante-quatre pays, plus
de deux mille langues vivantes, d’innombrables
identités et histoires culturelles entrelacées.
C’est mon ressenti en tant qu’africain et ma
vision d’artiste qui ont guidé la mise en espace
d’IncarNations. J’ai essentiellement voulu suggérer
un changement d’orientation dans la façon dont
nous abordons la question de l’Histoire, de son
récit et en particulier de ce que nous pourrions
appeler l’art africain. Pour cela je suis parti de l’espace
même du Palais des Beaux-Arts, conçu et bâti
par Victor Horta entre 1919 et 1928, et dont la
grandeur manifeste la richesse économique issue de
l’action coloniale qui se trouve alors à son apogée.
Les murs de l’exposition ont été laissés vides
pour que le visiteur puisse s’interroger sur le
contexte dans lequel ils ont été érigés. Seuls y ont
été posés un papier peint, des miroirs et quelques
installations vidéo. Le motif du papier peint est
composé du mot BELIEVE, divisé en trois lignes,
de sorte que le mot LIE taquine l’oeil et nargue
la vision périphérique du public, qui est amené à
douter de ce qu’il voit.
T. A. M. : Cette incitation au doute a beaucoup
d’une invitation à revoir son rapport intime à l’art
africain. Qu’en avez-vous tiré personnellement ?
FIG. 10 (CI-DESSUS) :
Figure nkisi songye (RDC)
disposée sur écran présentant
des vues de la même
sculpture scannée aux
rayons X.