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FIG. 7 (À GAUCHE) :
Autre vue de la fi gure 1,
trouvée près de la confl uence
de l’Amazone et du
Trombetas. Sur les côtés, il y
a deux têtes de personnages
enserrées dans d’immenses
griffes
Collection musée Dobrée
n° 887-13-1. Photo : Rostain.
espoir de les retrouver dans les sites précolombiens.
La chance sourit pourtant quelquefois au chercheur,
puisque des tablettes à inhaler en pierre furent utilisées
autrefois, et conservées jusqu’à aujourd’hui.
DE LA PIERRE POUR LA POUDRE
Pour absorber leur poudre favorite, les précolombiens
de la sylve équatoriale ont façonné dans
la pierre de petites fi gurines avec un art exquis.
Toutes proviennent de l’aval du fl euve Amazone,
aux confl uences avec le Trombetas ou le Tapajos,
près de la ville actuelle d’Obidos. Aucune ne fut hélas
trouvée en fouilles archéologiques, mais lors de
simples découvertes fortuites, aussi aucun contexte
fi able ne leur est associé. Elles sont néanmoins très
rares car moins d’une trentaine de spécimens seulement
sont connus au monde. Elles sont conservées
dans les musées brésiliens, mais également anglais
et suédois, des anthropologues de ces pays ayant
arpenté l’Amazonie au début du XXe siècle. En
effet, elles ont retenu l’attention car leur nature
pérenne et leur aspect insolite détonaient, dans un
univers où priment les objets de terre cuite, de bois,
de plumes et autres matériaux périssables.
Les statuettes représentent des êtres très différents,
mais elles affi chent toutes un « air de famille ». Ce qui
est sûr, c’est qu’elles sont l’oeuvre d’habiles sculpteurs
maîtrisant parfaitement l’art lithique. Elles sont faites
dans de tendres roches vert clair ou beige rougeâtre,
qui se raye facilement. Presque toutes sont munies
d’une cavité pouvant recevoir la poudre hallucinogène.
L’autre caractère commun à ces artefacts est la présence
systématique de deux perforations jumelles, et c’est
même à ça qu’on les reconnaît. Ces deux trous parfaitement
ronds traversent partiellement ou complétement
l’objet. On a parfois suggéré qu’ils servaient à recevoir
les pailles à inhaler, mais cela reste peu probable. De
même, l’absence de marque d’usure sur les bords des
trous invalide la possibilité de passage de liens.
Les deux fi gurines de Nantes ont été découvertes
sur les rives du lac Sapacua, à l’embouchure
du Trombetas. À l’instar de haches de pierre cérémonielles
et de poteries élaborées remontées du
lit des rivières de Guyane française, l’association
systématique des statuettes à des lacs riverains de
l’Amazone peut laisser penser à un dépôt rituel ou
FIG. 6 (CI-DESSUS) :
Figurine d’un être
serpentiforme fl anqué de
deux poissons, envoyée
au XIXe siècle à Nantes par
l’abbé Cullère.
Collection musée Dobrée n° 886-6-2,
photo : Rostain.
HISTOIRE D'OBJET