
PERSONNALITÉ
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FRISE, DE GAUCHE À
DROITE
FIG. 5 : Masque masculin.
Songye, sous-groupe
Kalebwe, région de Tshofa,
RDC.
Bois, pigments naturels. H. : 73 cm.
Ex Raoul Lehuard, Arnouville, 1987 ;
Marc Ginsberg, NY, 1972-82.
Type grand et pointu avec des stries
concentriques cerclant les yeux.
FIG. 6 : Masque masculin.
Songye, sous-groupe
Kalebwe, RDC.
Bois, pigments naturels. H. : 58 cm.
Collecté par Karel Plasmans 1955-73,
transmis par héritage dans sa famille
en Belgique.
Stries profondes et fort rétrécissement
central.
FIG. 7 : Masque masculin.
Songye, RDC.
Bois, pigments naturels et industriels.
H. : 55 cm.
Collecté sur le terrain par Karel
Plasmans, 1955-72.
Stries concentriques cerclant les yeux.
FIG. 8 : Masque féminin.
Songye, sous-groupe
Kalebwe, RDC.
Bois, pigments naturels, poil animal.
H. : 30 cm.
Ex Pierre Dartevelle, BRUNEAF, 2012,
Bruxelles ; Hôtel Drouot, mai, 1954.
Motifs de zig-zag sur les yeux et
bouche souriante.
m’étais lié d’amitié avec pas mal de marchands
bruxellois qui participaient aux foires d’art
tribal de Santa Monica et de San Francisco et
avaient acheté des masques. J’ai immédiatement
acheté à Didier Claes un très bon vieux masque
féminin songye. Je suis allé à la galerie de Pierre
Dartevelle et me suis présenté. Il a dit : « Ah,
monsieur Kifwebe. » Au fi l de longues années,
j’ai acquis beaucoup de beaux masques auprès de
lui et de nombreux autres marchands au Sablon.
Je me rapelle t’avoir acheté un remarquable
masque songye, Alex. J’ai également rencontré
la spécialiste des Songye, Dunja Hersak, et nous
sommes devenus de bons amis. Nous avons passé
de nombreuses heures à discuter de notre passion
commune à Bruxelles et également chez moi à
Venice, en Californie.
J’ai d’abord été frappé par la géométrie de la
structure faciale qui, dans certains cas, étirait
le masque en une sorte d’être futuriste. Ensuite,
j’ai vu une expression brute émerger, parfois
c’était l’agressivité, la beauté, le pouvoir, la
sérénité et bien d’autres émotions presque
indéfi nissables, parfois en un sens c’était subtil
et spécifi que au genre. Cette combinaison
d’intelligence et d’émotion était parallèle à mon
travail à cette époque. Tandis que j’apprenais
comment ils étaient utilisés et quelles fonctions ils
remplissaient, je savais que je voulais approfondir
cela. Je les voulais dans ma vie, en grand nombre.
Chaque fois que je regardais l’une de ces créatures
et qu’elle me regardait, c’était une expérience
individuelle différente, un sentiment différent
alors que nous nous regardions dans les yeux.
Je me souviens de l’exposition Face of the Spirits
de Frank Herreman et Constantin Petridis en 1994
au National Museum of African Art, Smithsonian
Institution, de Washington, D.C., qui m’a beaucoup
inspiré. J’ai invité Frank à parler au Ethnic Arts
Council de Los Angeles, comme je l’avais fait avec
Marc Felix, Christopher Roy, Susan Preston Blier,
Elizabeth Cameroon et d’autres. À ce moment-là,
ma courbe d’apprentissage s’accentuait et j’achetais
de bons masques. Au début, je me suis concentré sur
les formes classiques, mais j’ai évolué ensuite vers
des styles peu et vers des exemplaires atypiques.
Quand je suis allé pour la première fois
à BRUNEAF à Bruxelles, je fus ébahi par
l’opportunité de voir autant de ces pièces. Je
A. A. : Que représentent pour toi les masques
kifwebe ? Qu’est-ce que cette longue
« spécialisation » t’a appris ?
W. D. : Tout d’abord, je dois préciser que je
ne suis pas un érudit. Je suis un artiste et un
collectionneur obsédé par ces masques à stries
des peuples Songye et Luba. J’ai mes propres
idées, mais je laisserai toutes les discussions
anthropologiques aux spécialistes. Pour moi, les
bifwebe sont un hybride visuellement excitant
et mystérieux d’animal, d’esprit et d’humain.
Ils défi ent notre monde d’expérience connu,
établissant un passage de ce monde vers le monde
des esprits. Ils sont magiques, ils guérissent, ils
détruisent, ils créent la stabilité dans le village.