
L'art nègre a ses
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faussaires
Depuis un certain nombre d’années,
l’art nègre a éveillé la curiosité de pas mal de nos
compatriotes. Ils l’ont aimé pour de multiples
raisons qui peuvent se ramener à deux causes
principales.
Les uns ont collectionné les objets africains parce
que ceux-ci leurs rappelaient le souvenir exaltant des
premiers coloniaux ; parents, amis, qui sont allés
au loin vivre une vie de rêve et d’aventure.
D’autres ont rassemblé masques, ivoires
et fétiches du continent noir, parce que, à
la suite d’un étrange retour d’infl uences, ces
différents éléments constituaient des bases authentiques
autour desquelles l’art contemporain
faisait d’importantes expériences. Bref, les écrivains
et les artistes ont créé la mode de l’art nègre.
Hélas, ensuite vinrent des personnes peu scrupuleuses
qui remplacèrent l’affection désintéressée
des premiers, par une exploitation systématique
du goût nouveau.
Une recherche qui était due à la tendresse familiale
ou aux exigences de la sensibilité artistique,
devint bientôt pour certains, le moyen de s’enrichir
rapidement sans effort et sans risque.
Et ce qui arriva aux meubles gothiques, aux
tableaux de primitifs, aux bijoux égyptiens,
aux porcelaines exotiques, fut le sort de l’art
nègre : on fi t des faux.
Heureusement, en ce domaine on a pu limiter
les dommages et nous n’hésitons pas à affi rmer
que par l’étroite collaboration des ethnologues,
des conservateurs de musées, des collectionneurs
avertis, et des marchands consciencieux on arriva
facilement à dépister en ce domaine le vrai du faux.
Ce sont les marchands avant tous autres qui sont
les mieux placés pour découvrir les pistes à suivre
éventuellement, ils sont en contact permanent avec
le public et les amateurs qu’ils peuvent interroger
adroitement de façon à obtenir au sujet des prétendues
aubaines « miraculeuses », des renseignements
précis. On se plaît si volontiers à démontrer à un
commerçant qu’il vend trop cher ses vrais objets
For quite some years now, art
nègre has aroused the curiosity of a substantial
number of our compatriots. They have
been drawn to it for a variety of reasons and
for two in particular.
Some collected African art objects because
they brought back memories of early colonial
exploits—of relatives and friends who
went to live in faraway places to experience a
dream and a life of adventure.
Others collected masks, ivories, and fetishes
from the African continent because of a
strange exchange of influences through which
these new forms constituted inspirational elements
for modern art and its creators. To
make a long story short, writers and artists
made art nègre both a fashion and a trend.
Alas, unscrupulous people soon
arrived on the scene, and they
supplanted the pure approach
that its first advocates had experienced
with a pecuniary one
Art Nègre and
Its Forgers
Par / By Jeanne Walschot †
that systematically exploited this new predilection.
For some people, this new trend soon
became a way to amass wealth with little or
no effort or risk. In short, the same thing that
had happened to Gothic furniture, paintings,
Egyptian jewelry, and exotic porcelain happened
to primitive art: fakes were produced.
Thankfully, in this field the damage could
be limited, and through close collaboration
with ethnologists, museum curators, conscientious
collectors, and informed dealers,
fakes and authentic objects generally are easy
to identify and tell apart. Dealers are the
best situated to make the right calls, since
they are the ones who are in constant contact
with the public and the aficionados whom
they can question and talk with to get reliable
information about miraculous so-called
“bargains”. People are always ready to point
fingers at a dealer who sells his authentic artworks
too expensively, but everyone seems to
FIG. 1 (CI-DESSOUS) :
H ach ette. Y ak oma, RD C.
Q uatriè me q uart du XIX e siè cle.
L. : 34,5 cm.
D on de J. W alsch ot via
H. V an G eluwe. I nscrite en 19 80
dans les collections du MRAC,
EO.19 80.2.2 009.
FIG. 1 (ABOVE):
Axe. Y ak oma, D R Congo.
F ourth q uarter of th e
19 th century.
L: 34.5 cm.
D onated b y J eanne
W alsch ot via
H. V an G eluwe.
Accessioned by th e
RMCA in 19 80,
EO.19 80.2.2 009.