MUSÉE à la Une 76 1950, des missionnaires européens, administrateurs coloniaux, marchands d’art et professionnels de musées ont consacré énormément de temps et de ressources à collecter des oeuvres d’art dans le nord de la Côte d’Ivoire pour des raisons qu’ils n’ont peut-être jamais livrées par écrit (fig. 2). À l’époque, certains habitants de la région – jeunes ou plus âgés – particulièrement entreprenants se sont sans doute réjouis de la possibilité d’investissements étrangers dans les arts et ont cherché des moyens de s’enrichir personnellement ou collectivement. Les informations disponibles aujourd’hui à ce sujet ne révéleront peut-être jamais dans quelle mesure les habitants de la région ont associé des objets à certains noms ou récits dans le but d’accroître leurs revenus. S’ils ont effectivement vendu des noms et des récits avec les objets, on peut en déduire que la capacité des artistes et des marchands à cerner leur public et à répondre aux attentes de leur clientèle l’a probablement emporté sur la lucidité de certains acheteurs. Un nombre incalculable de circonstances historiques et d’individus est à l’origine de la création, l’utilisation et la circulation de sculptures et d’autres formes d’art attrayantes. Loin d’agir comme des automates au sein d’une sphère culturelle prédéfinie, les artistes, mécènes et membres des communautés de la région des trois frontières se sont adaptés et continuent de s’adapter aux individus et aux circonstances lorsqu’ils entreprennent une activité, qu’il s’agisse de création, de mécénat ou de promotion des arts. Ainsi, une oeuvre qui correspond à un style artistique historique défini par un groupe culturel ou ethnique ne révélera sans doute que peu de choses, voire rien, si ce n’est la manière dont les spécialistes et les connaisseurs occidentaux l’ont catégorisée. Au contraire, chaque objet, assemblage, installation ou réalisation – qui a été façonné – offre des possibilités illimitées d’examiner le dynamisme historique, les contextes précis, l’identité individuelle et les préoccupations esthétiques contribuant à la production et la réception de cette oeuvre. Reconnaissant l’absence, l’inaccessibilité ou la futilité des informations se rapportant à certains objets conservés dans des collections, la publication accompagnant l’exposition, rédigée par Gagliardi, évite le recours à des noms vernaculaires pour se référer aux pièces. Elle ne confirme pas l’attribution senufo des objets et ne se livre pas non plus à des spéculations sur la biographie d’une oeuvre. Il se refuse également à promouvoir ou confirmer la réattribution d’un objet, à identifier la griffe d’un artiste, ou à estimer l’âge d’un objet. La provenance d’un objet n’est renseignée que par les informations sur l’histoire d’une oeuvre rapportées par son ancien – ou actuel – propriétaire ou consignées dans une publication. Ces données exigent toujours une évaluation prudente. Aussi, dans le cas des cartels accompagnant
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