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FIG. 8 (À GAUCHE) : Statue fémine. Ra’ivavae, Îles Australes. Reproduite p. 84-85. FIG. 9 (CI-DESSOUS) : Figure Tangiia. Mangaia, Îles Cook. Reproduite p. 70. FIG. 6 : Couverture de l’ouvrage primé dans la catégorie anglophone. Atua, Sacred Gods of Polynesia, Michael Gunn. National Gallery of Australia. FIG. 7 (À DROITE) : Figure masculine. Rapa Nui. Reproduite p. 182-184. ger sur ce que les personnes croyantes ressentent. En ce qui concerne l’art polynésien, force est de constater que la plupart des objets préchrétiens qui se trouvent aujourd’hui dans les collections muséales doit leur origine à des besoins suscités par l’interaction entre les hommes ou entre ces derniers et le divin. Néanmoins, fort étrangement, beaucoup d’auteurs ayant écrit sur les objets d’art religieux polynésiens n’ont accordé le statut d’ « art religieux » qu’aux créations émanant de la pratique chrétienne, partant du principe qu’en Polynésie, toute activité religieuse antérieure au christianisme n’en n’était pas véritablement une ou, du moins, qu’elle était à bannir. Après avoir découvert ou réalisé qu’au moins quelques-uns de ces objets polynésiens préchrétiens manifestaient ou conservaient une « présence » (ou atua), j’ai décidé d’assumer que ce en quoi le peuple polynésien pré-chrétien croyait était vrai, ou du moins traduisait une vision de la réalité quand bien même elle fut rejetée par l’Occident. Désireux de déceler la vie dans un objet, j’ai alors interrogé plusieurs de mes amis scientifiques quant au meilleur procédé pour y aboutir. Ces derniers m’ont tous conseillé d’opter pour une expérimentation à double insu, mais je me suis vite aperçu que cette méthode ne marcherait pas avec ces « présences » car celles-ci semblaient posséder une vie ou un esprit bien à elles et qu’elles seules choisissaient, ou pas, de se manifester. J’ai donc décidé de chercher les preuves ailleurs, là où il me sembla trouver une certaine objectivité : dans les documents produits par ceux qui cherchèrent à détruire ces « présences » contenues dans les objets. T. A. M. : Les objets dont il est question dans ce livre ont quitté très tôt leur contexte originel, dès le XVIIIe siècle pour certains. De plus, leur réception en Occident a considérablement été marquée par les interprétations qu’en ont faites les missionnaires chrétiens qui se rendirent, au nom d’un autre dieu, sur le terrain. Comment avez-vous fait pour retrouver d’une certaine façon l’essence de ces oeuvres que vous décrivez dans des notices très détaillées ? M. G. : J’ai essayé de m’éloigner des idées généralement publiées sur ces objets, d’une part parce qu’elles ne me satisfaisaient pas et, d’autre part, parce qu’elles ne me semblaient pas tout à fait cohérentes. J’avais déjà ressenti le problème dans les années 1980, alors que je me trouvais dans les îles Tabar en Nouvelle-Irlande, travaillant avec les habitants et cherchant à comprendre pourquoi ils créaient des objets d’art (ou malagan) et à quoi ces objets servaient. Ces gens possèdent une langue et une culture qui proviennent en grande partie des peuples austronésiens – connus aussi aujourd’hui comme les populations Lapita – et considérés également comme les ancêtres des Polynésiens. Tous les sculpteurs de malagan et tous les propriétaires de malagan avec lesquels j’ai parlé alors ont insisté sur un point : leurs créations n’étaient que des images, elles n’étaient en aucune manière « actives », hormis bien sûr les sculptures mala- 3 QUESTIONS À MICHAEL GUNN, AUTEUR DE Atua, Sacred Gods from Polynesia Tribal Art magazine : Ce livre et l’exposition éponyme qu’il accompagne se penchent sur une notion – le divin et sa représentation – qui relève plus de la croyance intime que du fait observable et rationnel. Comment aborde-t-on un tel sujet et qu’est-ce que l’expérience des cultures polynésiennes apporte à sa compréhension ? Michael Gunn : Élevé dans un entourage athée, je le suis resté toute ma vie. Cela ne m’a pas empêché de développer une profonde curiosité vis-à-vis du sentiment religieux et de m’interro-


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