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SogSoCUloLnP lTaU sRcEro ZfuOlMeuBsOe 103 potentiel actif qui la transforme, du coup, en charge au sens propre telles celles insérées sous forme d’amas de substances magiques dans tant d'objets dits « fétiches »70 du continent africain ? Pour répondre à cette question, il convient sans doute de prendre en compte une série de constatations. En effet, ces portraits s’inspirent de personnes qui ont vécu il y a plusieurs siècles dans la région du DIN, même s’ils ne les représentent pas directement. Indépendamment de la bosse dorsale, les personnages paraissent encore vigoureux et même jeunes. L’un d’eux (fig.17) possède de surcroît deux volumineuses masses dorsales et une masse axillaire droite plus discrète, et enfin, les statues masculines évoquent des paralytiques ou, à tout le moins, des handicapés. Parmi les hypothèses probables qui pourraient apporter une explication à l’ensemble de ces faits, on retiendra au premier chef une maladie infectieuse fréquente dans cette région d’Afrique, où elle est endémique et aisément transmissible : la tuberculose avec, en particulier, ses complications extra-pulmonaires. En effet, une des manifestations extra-pulmonaires est la tuberculose osseuse, dont la spondylodiscite (infection osseuse de la colonne vertébrale ou « mal de Pott ») a pour conséquence fréquente le collapsus des corps vertébraux infectés avec l'apparition secondaire d’une hypercyphose dorsale (gibbosité). Cette spondylodiscite provoque aussi la formation d’abcès froids qui fusent le long de la colonne vertébrale et peuvent alors entraîner une paraplégie ou paraparésie, c’est-à-dire une paralysie totale ou partielle du bas du corps et en particulier des membres inférieurs que l’on observe d’ailleurs aussi avec la poliomyélite également endémique dans la région (fig. 23). Il n’est donc pas impossible que ce soit le mal de Pott qui ait inspiré les artistes dans la représentation de l’affection dont souffrent les trois hommes des statues envisagées. Par la même occasion, ils auraient stigmatisé le symptôme, pour rappeler le handicap de départ dont a souffert Soundjata. Dans le mal de Pott, si l’infection osseuse a débuté en bas âge, la déformation de la cage thoracique peut conduire à une protrusion du sternum. Dans le contexte que nous venons d’évoquer, il pourrait donc être judicieux d’attribuer cette anomalie sternale à la représentation d'une complication tuberculeuse extra-pulmonaire. Une autre manifestation extra-pulmonaire, représentée sur une des statues (fig. 17), pourrait relever de la tuberculose ganglionnaire (cf. les masses arrondies dans le creux axillaire droit et de part et d’autre de la colonne vertébrale) (fig. 18). Par ailleurs, si la jambe de la statue du mqB appartient bien à la figure en question – comme confirmé par le scanner (fig. 4) – nous nous inscrivons en faux par rapport aux deux interprétations admises jusqu’à présent, à savoir qu’il s’agit de la jambe et du pied droits de la femme, et que cette jambe adopte une position particulière car elle fait partie d’un corps de défunte introduit de force dans une urne funéraire71. Nous pensons qu’il s’agit d’une explication erronée pour les raisons suivantes : cette femme est jeune (seins toniques) et présente un statut pondéral plus que satisfaisant. Elle a les yeux largement ouverts et la tête tournée dans une position requérant à l’évidence un bon tonus musculaire cervical. En outre, le FIG. 21 : Statue représentant un handicapé, région du DIN, Mali. XIIIe-XVIIe s. Terre cuite à engobe ocre rouge. H. : 40 cm. Ex-coll. Baudouin de Grunne. Collection privée. © Dr Marc Ghysels, Bruxelles. Photo : Frédéric Dehaen. Studio Roger Asselberghs, Bruxelles. FIG. 22 : CT-scans de la figure 21, vues 3D opaques selon deux incidences. © Dr Marc Ghysels, Bruxelles.


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