MUSÉES à la Une 86 FIG. 12 (CI-DESSOUS) : Boîte. Kuba, RDC. XIXe siècle. Collectée par le père Cambier, 1891. Bois (Crossopteryx febrifuga). D. : 15,5 cm. MRAC, Tervuren, EO.1986.22.78. © MRAC, Tervuren, photo : J.-M. Vandyck. PAGE DE DROITE FIG. 13 (À GAUCHE) : Mboong itool. Kuba, RDC. XIXe siècle. Collecté par Léon Rom dans les années 1890. Poudre de ngula/tukula et argile. H. : 21 cm. MRAC, Tervuren, EO.0.0.28550. © MRAC, Tervuren, photo : J.-M. Vandyck. Occupant une place aussi importante que les textiles et les objets présentés dans l’installation, le catalogue présente un degré d’expertise réellement innovant. Après une introduction relative à l’art et la culture des Kuba, Patricia Darish s’intéresse pour la première fois aux textiles du MRAC et de la Sheppard Collection dans leur contexte colonial. Elle compare également les objectifs et les points de vue de Macar et Sheppard, deux personnalités marquantes qui ont non seulement collecté les objets exposés, mais ont aussi produit les premiers documents concernant l’art et la culture Kuba. L’auteure explore ensuite en détail les manières dont des hommes et des femmes kuba évoluant dans des contextes économiques et sociaux différents ont créé, pendant plusieurs siècles, du tissu de raphia et confectionné des textiles permettant d’identifier le rang et le statut des vivants et des défunts2. L’analyse des détails techniques comme la finition, la teinture, la construction et l’assemblage de ces textiles figure également dans le catalogue, à la faveur d’un article rédigé par Christine Giuntini qui propose une nouvelle approche pour l’étude de ces oeuvres d’art3. Parmi ces jupes et pagnes, certains se caractérisent par la prédominance d’un colorant rougeâtre appelé tukula / ngula. Son origine et la façon dont il est traité et utilisé sont des sujets abordés par Julien Volper dans un autre article du catalogue4. L’analyse de Volper souligne l’importance des différents types d’objets associés à l’art du tukula / ngula, créé en alliant huile végétale et poudre rougeâtre extraite d’un arbre à bois dur. Parmi les objets exposés s’y rapportant figurent des blocs de tukula ; un bol à mélange tukula ; des sculptures en pâte de bois de padouk appelées mboong itool (fig. 13) et des boîtes à couvercle qui servent, entre autres, de récipients pour la poudre de tukula, utilisée non seulement pour teindre le raphia, mais aussi comme produit cosmétique pour le visage et le corps des femmes (fig. 12). Les sculptures en pâte de bois de padouk, qui présentent les motifs disposés géométriquement que l’on trouve souvent sur les textiles, étaient également fabriquées par les femmes et servaient de cadeaux lors des cérémonies funéraires. Afin de renforcer la méthodologie historique de l’exposition, l’installation comporte également des photographies sur carte postale et des cartes commerciales qui illustrent les diverses manières dont les images occidentales contemporaines ont popularisé le faste de la monarchie kuba dans le monde entier au cours du XXe siècle. Dans son article rédigé pour le catalogue de l’exposition, Christraud M. Geary5 affirme que les rois uba, membres de l’élite, et les artistes eux-mêmes participaient activement à ce processus. Enfin, l’exposition se penche sur la façon dont les motifs kuba ont inspiré les artistes occidentaux du XXe siècle. Certains spécialistes ont déjà relevé que Henri Matisse et Paul Klee avaient été influencés par ces motifs et l’on a parfois évoqué le peintre autrichien Gustav Klimt, collectionneur d’art et de textiles africains, bien que ce lien n’ait jamais fait l’objet d’une analyse approfondie. Verena Traeger note une correspondance entre les éléments décoratifs présents dans le travail de Klimt, en particulier durant sa « période dorée », et les motifs kuba6. En se basant sur les textiles du MRAC et de la Hampton University, Kuba Textiles: Geometry in Form, Space, and Time7 réunit d’importants exemplaires issus de collections vieilles de plus d’un siècle, tandis que le catalogue apporte de nouveaux points de vue historique, technique et contextuel. Fruit d’une recherche visuelle et matérielle, d’archives et d’un travail anthropologique de terrain, l’analyse des textiles kuba et des sculptures en bois, tukula et autres objets qui y sont intimement liés marque une évolution en matière d’expertise quant à l’art de ce peuple à sa créativité extraordinaire. NOTES 1. Voir Académie royale des sciences d’Outre Mer, Biographie Belge d’Outre-Mer, vol. 6 (Bruxelles : 1968), « Charles Henri-Marie Ernest Tombeur de Tabora » coll. 1022–26. 2. Article du catalogue : A Land of Great Promise: Exploration and Kuba-Decorated Textiles in the Late Nineteenth Century. 3. Article du catalogue : Rare Beauties: Technique and structure of Early Kuba Garments. 4. Article du catalogue : Women in Red: The Kuba Art of Tukula. 5. Article du catalogue : Creating and Disseminating Images of the Kuba and Their Arts, 1885–1971. 6. Article du catalogue : Gustav Klimt and Kuba Affinities. 7. Kuba Textiles a été réalisée grâce aux généreuses contributions de la Coby Foundation, Ltd ; le National Endowment for the Arts ; le New York State Council on the Arts ; Arts Westchester, avec le soutien du Westchester County Government ; et d’Elisabeth et Bob Wilmers. L’exposition a bénéficié également du soutien des membres de l’African Arts Council of the Neuberger Museum of Art, des amis du Neuberger Museum of Art, et du Purchase College Foundation. FIG. 14 (À DROITE) : Détail du pagne en figure 7. Kuba, Bushoong, RDC. XIXe siècle ? Raphia brodé. 19,1 x 45,7 cm. The Metropolitan Museum of Art, don de William B, Goldstein, 2001.271.5. © The Metropolitan Museum of Art, image : Art Resource.
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