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MUSÉE à la Une DADA AFRIKA Un projet d’exposition transdisciplinaire Par Michaela Oberhofer, Esther Tisa Francini et Ralf Burmeister Dada Afrika est la première exposition dédiée spécifi quement à l’intérêt des artistes dada pour les arts et les cultures d’Afrique, mais aussi d’Asie, d’Amérique et d’Océanie. En ce sens, elle contribue d’une façon très singulière 84 à la commémoration du centenaire du mouvement dada à Zurich, né avec l’ouverture du Cabaret Voltaire le 5 février 1916. À l’instar de Pablo Picasso, Ernst Ludwig Kirchner et Emil Nolde, des artistes plastiques dada tels que Marcel Janco, Sophie Taeuber-Arp, Man Ray ou encore Hannah Höch se sont fortement intéressés à l’altérité culturelle. S’inspirant d’artefacts d’Afrique et d’Océanie, ils ont créé des oeuvres à partir de matériaux qui n’avaient pas été utilisés jusqu’alors dans l’art occidental. Dans le domaine de la littérature, des écrivains tels que Hugo Ball, Richard Huelsenbeck et Tristan Tzara se sont inspirés de la littérature orale africaine et australienne – accessible notamment sous la forme de transcriptions dans des ouvrages ethnologiques – pour faire des expérimentations avec le langage. Toutefois, les dadaïstes ne se sont pas contentés de copier ou d’adapter des éléments exotiques. Leur intention était plutôt de dépasser les limites de leur art et de leur langage et de s’inspirer de cultures non occidentales. Présentant plus de cent oeuvres de vingt musées internationaux et de collectionneurs privés, l’exposition et le catalogue qui l’accompagne sont issus d’une collaboration entre une institution du pays (la Suisse) où Dada vit le jour – le Museum Rietberg de Zurich – et un musée berlinois – la Berlinische Galerie – où émergea une scène dada fortement politisée. En outre, l’association entre ces deux centres d’art abritant des collections si différentes a favorisé également une approche transdisciplinaire du sujet. Aussi, celui-ci estil abordé depuis la perspective de l’ethnologie, de l’art, de l’histoire, mais aussi de la littérature, donnant tout son sens au dialogue découlant de la juxtaposition entre les oeuvres dadaïstes et l’art d’autres régions du monde (fi g. 1). FIG. 1 (À DROITE) : Vue de l’entrée de l’exposition Dada Afrika. © Museum Rietberg, Zurich. photo : Rainer Wolfsberger. FIG. 2 (CI-DESSUS) : Raoul Hausmann, OFFEAH, 1918. Affi che avec poème imprimée sur papier orange. © Berlinische Galerie, BG-G 7224/93. © Berlinische Galerie, photo : Anja Elisabeth Witte. 2016 ProLitteris, Zurich. La confrontation des artefacts a suivi méthodiquement le principe d’équivalence et de contemporanéité. Au dialogue fertile entre les oeuvres plastiques dadaïstes et non occidentales s’ajoutent les bornes audio de poèmes dadaïstes (fi g. 2) et leurs sources d’inspiration non occidentales. Pour la première fois également, le poème phonétique Toto Vaca de Tristan Tzara est confronté à la source originale « Toto Waka », à savoir un chant en maori, et à sa traduction allemande faite par un missionnaire. Tristan Tzara a utilisé le texte en maori comme un ready-made dadaïste.


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