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Portraits photographiques d’Afrique de l’Ouest 87 Bamako ; un mythe que ses photographies racontent encore aujourd’hui (fi g. 11 et 12). Oumar Ka se forme auprès du photographe sénégalais Cheikh Kane et commence sa carrière comme photographe itinérant en 1959 avant d’ouvrir son propre studio dans la ville de Touba en 1968. Ka photographie les communautés rurales qui vivent à l’intérieur des terres. Il voyage de village en village et réalise des portraits à l’aide du seul matériel qu’il est en mesure d’emporter, son appareil Rolleifl ex et une toile de fond monochrome. Contrairement à Keïta, Ka ne resserre pas l’image sur le modèle et ne joue pas sur de forts contrastes de tons au moyen de toiles de fond. Il maintient une distance respectueuse avec les modèles afi n d’inclure l’architecture locale, des paysages ouverts et des intérieurs de maisons (fi g. 13 et 14). Malgré le contraste entre les compositions denses de Keïta et les portraits plus larges de Ka, leurs modèles partagent la même présence imposante et empreinte d’assurance. NOTES 1. L’autre exposition, The Aftermath of Confl ict: Jo Ractliffe’s Photographs of Angola and South Africa, est visible du 24 août 2015 au 7 mars 2016. Comportant des oeuvres réalisées par l’un des artistes sud-africains les plus en vue, elle a été organisée pour coïncider avec l’exposition Kongo: Power and Majesty qui s’intéresse à des oeuvres créées entre les XVIe et XIXe siècles par des artistes de l’Angola actuel (l’exposition sera présentée au Metropolitan Museum du 17 septembre 2015 au 3 janvier 2016). Les paysages capturés par Ractliffe illustrent un chapitre plus récent de l’histoire de l’Angola. 2. Giulia Paoletti, « Un Nouveau Besoin: Photography and Portraiture in Senegal (1860–1960) » Thèse (Ph.D.), Columbia University, 2015. 3. Échange d’e-mails avec Erin Haney, juin 2015. FIG. 13 : Oumar Ka (Sénégalais, né en 1930), autoportrait dans sa demeure, 1959–1968. Négatif. 17,8 x 17,8 cm. Metropolitan Museum of Art. Visual Resource Archive, Department of the Arts of Africa, Oceania, and the Americas, 2015. Durant sa carrière, Oumar Ka a produit une multitude d’autoportraits minutieusement agencés. Comme dans la plupart de ses portraits, Ka ne se contente pas de photographier sa propre image, mais il fait ressortir son personnage en incluant dans l’image son environnement. On aperçoit l’architecture intérieure de la maison au toit de chaume, la garde-robe et des douzaines de portraits suspendus derrière lui. Ka tirait ses autoportraits en de très nombreux exemplaires qu’il offrait en cadeau à ses meilleurs clients. Il s’agissait d’une stratégie commerciale délibérée visant à faire plaisir et remercier sa clientèle. Ce portrait représente Ka en tant que photographe professionnel, conscient de son art, gérant ses affaires de façon stratégique et attentif à son image. FIG. 14 : Oumar Ka (Sénégalais, né en 1930), homme debout dans une cour, 1959–1968. Négatif. 17,8 x 17,8 cm. Metropolitan Museum of Art. Visual Resource Archive, Department of the Arts of Africa, Oceania, and the Americas, 2015. L’insertion de la toile de fond monochrome de Ka, discrète en comparaison du vaste paysage semi-désertique, permet de situer le modèle et de défi nir cette image comme un portrait formel. La chemise de l’homme, ses sandales de cuir et son pantalon ample appelé « thiaya » suggèrent qu’il s’agissait d’un maçon venu réaliser son portrait lors d’une journée de travail. Ka utilise un grand angle afi n d’incorporer les rues sablonneuses de la région de Baol, son ciel couvert et un vaste ensemble de bâtiments. Il joue avec les différentes surfaces et les refl ets qu’elles renvoient afi n de créer des motifs qui modulent et enrichissent la composition. La répartition inégale de l’espace entre le modèle et le paysage révèle la fascination de Ka pour son environnement.


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