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HISTOIRE d’objet Wajaje connus fi gurant sur l’intégralité du calendrier. Parmi les cent vingt-sept glyphes qui apparaissent sur le Calendrier des Hivers wajaje, beaucoup peuvent être interprétés avec précision en étant recoupés avec des événements 132 historiques connus et d’autres calendriers des hivers, mais aussi en interprétant les différentes images, dont l’iconographie est souvent relativement évidente. Par exemple, le glyphe symbolisant l’année 1833, une vue vers le haut de l’horizon enveloppant ainsi que vers le fi rmament rempli d’étoiles fi lantes, représente l’énorme tempête de météorites des Léonides ayant eu lieu le 12 novembre 1833, où dix mille météorites à l’heure traversèrent le ciel d’Amérique du Nord et d’Europe (fi g. 6 et 7). Sur le plan artistique, le Calendrier des Hivers Wajaje est assurément l’un des plus beaux exemplaires encore conservés de nos jours. L’utilisation des couleurs est incomparable. La majorité des calendriers des hivers étaient peints uniquement en noir ou en noir et rouge. On note ici la présence d’un remarquable spectre de couleurs, ce qui tend à prouver une excellente maîtrise de la technique du mélange des pigments. Les innombrables animaux et oiseaux illustrés refl ètent la biosphère de la région des Plaines, de la plus minuscule des fourmis au plus grand des bisons (fi g. 8 et 9). De nombreux glyphes sont incroyablement petits, de minuscules joyaux représentés avec la plus grande délicatesse et des ombres particulièrement subtiles (fi g. 10 et 11). Le Calendrier des Hivers Wajaje fournit un grand nombre d’informations nouvelles sur l’histoire ancienne des tribus Lakotas Teton du sud, à partir de la moitié du XVIIIe siècle, près de cinquante ans avant l’arrivée de l’expédition Lewis et Clark. Il permet de dater assez précisément le début de la migration des Lakotas, qui quittèrent les régions frontalières du Minnesota dans les années 1750. Le calendrier des hivers permet également d’éclaircir plusieurs points : ce sont bien les Wajaje, et non les Oglala, qui ont mené les explorations ayant conduit les Lakotas jusqu’aux Black Hills en 1773-1774 (fi g. 12). C’est avec les Wajaje que Pierre Antoine Tabeau échange des objets sur le Missouri dans l’actuel comté de Charles Mix, dans le Dakota du Sud, durant l’hiver 1794-1795, établissant ainsi le premier poste commercial de cet État (fi g. 13). Ce sont les Wajaje qui se trouvaient de l’autre côté de Cedar Island, non loin de l’actuelle ville de Chamberlain, dans le Dakota du Sud, durant cette nuit de 1809 où le poste de « Petit Castor », le nom qu’ils avaient donné au commerçant français Régis Loisel, partit en fumée après l’explosion accidentelle de son stock de poudre (fi g. 14). Outre ses saisissantes qualités esthétiques et son âge vénérable, le Calendrier des Hivers Wajaje apporte de nombreuses informations sur la période la moins connue de l’histoire des Lakotas. FIG. 11 : Glyphe de l’année 1782-83, « Yellow Hawk (Cetan Zi, Épervier Jaune) a été tué ». L’oiseau dans le glyphe nominal possède de courtes ailes, une queue rayée et les parties du dessous de son corps sont de couleur claire. De tels détails indiquent qu’il s’agit certainement d’un épervier brun en phase claire (Accipiter striatus). « Épervier Jaune » serait une dénomination non confi rmée et peutêtre personnelle. Le terme générique Lakota pour l’épervier brun est cetan gleglega ou « épervier tacheté » (Buechel, 1970 : 130), en référence aux plumes du corps. FIG. 12 : Glyphe de l’année 1773-74, « Les Wajaje découvrent les Black Hills ». On a longtemps pensé que les Oglala étaient les membres du groupe Lakota qui avaient guidé la migration vers l’amont de la White River afi n d’accéder aux Black Hills. La raison à cela est un glyphe, semblable à celui-ci, qui commence le Calendrier des Hivers de l’American Horse en 1775-76 et sur lequel un Oglala du nom de Standing Bull est désigné comme le premier homme de sa tribu à avoir atteint les Black Hills, revenant auprès des siens avec une essence d’arbre jamais vue auparavant (Corbusier, 1886 : 130). sur ce glyphe, il est indiqué que Standing Bull était en réalité un retardataire réagissant à la nouvelle selon laquelle les Wajaje avaient découvert les Black Hills deux ans plus tôt. L’arbre illustré est un pin tordu (Pinus contorta, latifolia), une variété environ deux fois plus grande que n’importe quelle autre essence d’arbre poussant plus loin vers l’est. Son tronc est grand, fi n, droit, léger et solide, ce qui convient parfaitement pour fabriquer la structure d’un tipi. Jadis, les tipis des Lakotas étaient relativement petits, bas et exigus. En hiver surtout – période qui peut durer plus de six mois dans les Plaines du nord – la vie de famille pouvait se révéler diffi cile dans un espace minuscule souvent rempli de fumée. Le pin tordu a changé radicalement la vie des peuples Lakotas en leur permettant de doubler leur surface habitable et d’améliorer leur santé et leur espérance de vie. En 1800, le diamètre moyen d’un tipi Lakota atteignait 5,5 m, tout comme sa hauteur. Les peaux tannées d’environ dix-huit bisons étaient nécessaires pour confectionner la couverture. Des tipis encore plus grands étaient créés pour accueillir les conseils. L’effet psychologique de ces changements est non négligeable, c’est pourquoi la découverte d’un arbre dans les années 1770 est restée gravée dans les mémoires de deux tribus. Outre la quantité abondante de gibier dans les Black Hills, le pin tordu est l’autre raison qui a poussé la génération suivante des hommes Lakotas à consacrer leur vie à chasser d’abord les Kiowas, puis les Crows de la région.


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