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131 Le plus ancien calendrier des hivers ayant subsisté fut commencé en 1680-1681. Il a été créé par les Sioux Yanktonais (Howard, 1976) qui, durant le dernier quart du XVIIe siècle, ont entamé la migration depuis la Vallée du Mississippi jusqu’au Coteau des Prairies de l’est du Dakota du Nord et du Dakota du Sud en remontant le fl euve Minnesota. Les Yanktonais ont été suivis par diverses tribus indéterminées des Lakotas Teton. L’une d’elles – qui à la suite d’un feu de prairie fut baptisée Sicangu (« Cuisses Brûlées ») et qui est plus connue sous sa traduction française « Brûlés » – avait adopté la tradition du calendrier des hivers dès 1700-1701 (Mallery, 1893 : 293 ; Curtis, 1908 : 161). Les Brûlés plus âgés se chargeaient de rappeler certains événements plus anciens et dont les dates furent calculées ultérieurement par des « gardiens » durant la première période des réserves (« 1687, We fi rst rode horses »). Cinquante ans après les Brûlés, lorsqu’une tribu Ponca expatriée appelée Wajaje (Wazaza ; Waziahziah) s’allia aux Lakotas Teton, ce groupe commença lui aussi à produire des documents similaires. Le plus ancien document Wajaje, nommé le « Calendrier des Hivers du Bouton de Rose », commence en 1752-1753 (Greene et Thornton, 2007 : 85). La chronique examinée dans le présent article (fi g. 2), aujourd’hui abritée dans la collection du Museum of Native American History à Bentonville, en Arkansas, est connue sous le nom de « Calendrier des Hivers Wajaje », en hommage aux peuples dont elle retrace l’histoire. Elle commence en 1758-1759 et a été transférée sur un voile de mousseline en 1870 environ, puis complétée jusqu’à ce qu’elle soit achevée en 1885-1886, le gardien manquant de place pour ajouter des glyphes supplémentaires (fi g. 3). Il s’agit du quatrième plus ancien calendrier des hivers subsistant encore aujourd’hui. Les Wajaje entretenaient d’étroites relations avec les Brûlés et les Oglala, et de ce fait partageaient avec eux de nombreuses expériences, de même qu’ils choisissaient souvent le même événement marquant pour symboliser une année, même si chacun concevait ses propres archives. Certains détails permettent toutefois d’attribuer ce document spécifi quement aux Wajaje. En 1876, à la suite de la bataille de Little Big Horn, l’armée des États-Unis confi squa tous les chevaux appartenant à la tribu Oglala du chef Nuage Rouge ainsi que ceux de la tribu Wajaje du chef Feuille Rouge (fi g. 5) à l’Agence Red Cloud. Cette année-là, aucune autre tribu Lakota ne perdit de chevaux. Le plus grand glyphe présent sur ce calendrier des hivers symbolise cet événement traumatisant survenu en 1876 (fi g. 4). Ce document n’étant manifestement pas d’origine Oglala, il en résulte par élimination qu’il est très probablement Wajaje. Cette hypothèse est confi rmée par les noms de famille FIG. 8 : Glyphe de l’année 1835-36, « Wizi encorné pendant la chasse ». Ici, un bison saignant, blessé par balle, a encorné un homme dans l’abdomen. Avant de mourir, le chasseur poignarde son bourreau. Le glyphe nominal de l’homme accentue le cuir foncé par la fumée situé au sommet d’un vieux tipi. Le mot Lakota pour désigner ce genre de cuir doux et étanche est wizi, ce qui signifi e « brun doré » (Buechel, 1970 : 593). Lorsqu’un tipi devenait trop usé, le wizi était toujours récupéré et réutilisé pour en faire des vêtements ou accessoires étanches : mocassins, jambières de chasse, etc. Un chef majeur des Yanktonais inférieurs des années 1880 est connu pour s’être fait appeler Wizi. À l’époque, il vivait dans la réserve de Crow Creek au bord du Missouri. Sur l’autre rive se trouvait la réserve des Brûlés inférieurs. Dans les années 1830, les Brûlés et les Yanktonais étaient alliés, ils chassaient et campaient souvent ensemble. Le Wizi dont il est question est né en 1833. Il est possible que l’homme tué deux ans après sa naissance ait été son père et que ce nom ait été transmis au fi ls. Un glyphe similaire fi gure sur le Calendrier des Hivers de Rosebud (Green et Thornton, 2007 : 199). FIG. 9 : Glyphe de l’année 1819-20, « Standing Elk (Hehaka Najin, Wapiti Debout) a été tué durant la chasse ». Un homme avec le glyphe nominal d’un wapiti est représenté en train d’être projeté par les cornes d’un bison. Selon des commentaires issus de certains calendriers des hivers de Rosebud, son nom serait Hehaka Najin, ou Wapiti Debout (Sundstrom, 2006 ; Buechel, 1970 : 171 et 346). Il s’agit d’un exemple de l’une des fi gures sur lesquelles la peinture à l’eau a été foncée par l’ajout de charbon. Les traits irréguliers d’un bout de bois calciné apparaissent clairement au-dessus de la couche noire de base. FIG. 10 : Glyphe de l’année 1779-80,« Red Otter (Ptan Luta, Loutre Rouge) a été tué ». Ce glyphe nominal est exécuté avec un raffi nement extrême, d’autant plus que sa taille est minuscule. Le nom Lakota est ptan (loutre) luta (rouge) (Buechel, 1970 : 447 & 326). La blessure mortelle par balle est visible sur la partie supérieure de la poitrine. Un calendrier des hivers


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