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Royaume kongo, en les démarquant de leurs pairs européens et locaux (fig. 18). En 1704, au coeur d’une crise politique sans précédent, une jeune femme kongo, Beatriz Kimpa Vita, fit campagne pour un renouveau religieux. Saint Antoine de Padoue était le symbole de son mouvement populaire qui réclamait une accessibilité à la chrétienté beaucoup plus grande que celle imposée par les élites kongo (fig. 19).18 Dans les nombreuses principautés et chefferies kongo, plusieurs objets d’apparat étaient remis aux souverains kongo lors des cérémonies d’investiture. L’un d’eux était un couvre-chef de prestige appelé mpu, réalisé en nouant des fibres d’ananas ou de feuilles de raphia. Les mpu des dirigeants les plus influents étaient rehaussés de griffes de léopard, animal parmi les plus puissants, disposées en couronne (fig. 20). L’autre attribut essentiel pour tout homme politique et de pouvoir était un bâton orné de motifs complexes et personnalisés. Le sommet de ces bâtons – souvent sculptés dans de l’ivoire onéreux – était couronné d’une figuration dont l’iconographie renvoie certainement à l’autorité exercée par un dirigeant particulier sur ces sujets. Parmi les thèmes représentés, on constate des chefs assis, saint Antoine de Padoue, des créatures animales et des figures féminines en attitude de dévotion (fig. 21, 23 et 24), ce dernier motif ayant donné les plus beaux développements. Il est rare que l’on sache à quel dirigeant politique, ou chefferie, doit être rattaché un bâton déterminé – conservé souvent sous une forme fragmentaire, avec les sommets figurés détachés. Quelques exceptions méritent une mention spéciale, notamment le bâton en bois encastré dans du métal (fig. 25) ayant appartenu au roi kongo Henrique II (r. 1842-1857) et la figure de femme en train de prier qui était le symbole de la chefferie majeure de Nemlão (c. 1788-1888) dans la région de Banana (fig. 24 et 26). Le pouvoir des femmes kongo L’impact dévastateur du commerce transatlantique d’esclaves et l’assaut colonial lancé par les puissances européennes anéantirent les communautés kongo. Dans une société qui valorisait le capital humain par-dessus tout, et dans laquelle le statut d’un individu se mesurait d’après le nombre de ses subordonnés, la capacité d’une femme à donner la vie était vénérée. La sociéte kongo était matrilinéaire et les fondatrices des clans étaient perçues comme des figures de « mère ». L’importance du rôle des femmes, comme garantes de la survie et de l’élargissement de la famille, a largement servi de symbole aux artistes pour exprimer l’idée de pouvoir (fig. 27 et 28). Parmi ces représentations féminines soulignant leur capacité essentielle à donner la vie, certaines étaient associées aux rites d’accession des jeunes filles à l’âge adulte et de FIG. 19 (CI-DESSUS) : Croix : Saint Antoine de Padoue. Peuples Kongo ; royaume de Kongo, RDC, République du Congo ou Angola. Figure, XVIe–XVIIIe siècle ; croix, XIXe siècle. Laiton (moule solide), alliage plombétain (feuille) et bois. H. : 32,4 cm. The Metropolitan Museum of Art, New York ; don d’Ernst Anspach, 1999 (1999.295.14). FIG. 20 (CI-DESSOUS) : Coiffe de prestige mpu. Peuples Kongo ; royaume de Kongo, RDC, République du Congo ou Cabinda, Angola. XIXe siècle. Fibres de raphia ou d’ananas et griffes de léopard. H. : 31,5 cm. Museu Nacional de Etnologia, Lisbonne (AO.168).


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