Page 124

untitled

DOSSIER 122 FIG. 6 (CI-DESSOUS) : La tenue nlongo. Photo du Rév. Thomas Lewis, Kibokolo, Angola, 1902/1903. D’après Weeks, 1911, planche en regard de la p. 58. PAGE SUIVANTE FIG. 7 : Masques nlongo. Photo du Rév. Thomas Lewis, Kibokolo, Angola, 1902/1903. Avec l’aimable autorisation de la British Baptist Missionary Society Archives. FIG. 8 : Détail du livre d’inventaire du British Museum où sont consignés les onze masques zombo donnés en 1905. Photo de l’auteure. s’agit visiblement d’une version kongo du longo ou peutêtre même d’un nom kikongo désignant la même institution, procédé qui, dans un passé récent, était largement répandu en Afrique centrale.17 Bien que le « programme » et le déroulement de ces rites aient certainement présenté quelques différences locales, on note néanmoins des signes d’une structure de base établie. Les rites débutent par la circoncision des néophytes pubères symbolisant la mort des garçons. Ceux-ci passent ensuite quelques mois – voire quelques années à une époque – en pleine brousse, dans un lieu clôturé et sacré (« kimpasi » ou « v(w)ela »), dans le but de les transformer en adultes productifs et responsables capables d’assurer la pérennité de la société. Durant cette période, on leur donne un nouveau nom, ils utilisent un vocabulaire ésotérique et reçoivent un enseignement en matière de règles ancestrales et de comportement sexuel. Ils sont également formés à bon nombre de pratiques, notamment la danse et le chant. Les impétrants auront à démontrer leurs compétences dans ces deux domaines en particulier lors des cérémonies finales, d’abord dans l’enclos d’initiation, puis dans les villages avoisinants. Ces performances leur permettent d’acquérir les ressources suffisantes pour dédommager leurs chefs, leurs circonciseurs/guérisseurs et les sculpteurs ayant créé les objets de pouvoir utilisés pendant leur période d’isolement. Très peu d’informations nous sont parvenues quant à la variante spécifique zombo de ces rites de puberté, le longo. Weeks (1914 rééd. 1969 : 172–175) décrit brièvement les pratiques de circoncision dans les environs de San Salvador et à l’est de la capitale royale. Il observe que les garçons vivent isolés pendant un an ou plus dans une grande maison ou hutte (vela). Il mentionne également que les Zombo « suivent de nombreuses cérémonies fétiches, … ; et lors d’occasions particulières, ils portent des masques de formes diverses et s’en vont danser dans les villes et sur les marchés, et demandent de l’argent aux femmes, qui, effrayées par les hurlements de ces figures grotesques gesticulant autour d’elles, s’exécutent. » Une autre source nous en apprenant davantage sur le longo est une paire de photographies (fig. 6 et 7), prises à Kibokolo durant la seconde moitié de 1902 ou 1903 par le révérend Lewis lui-même. On y voit un groupe d’individus masqués poser côte à côte pour le photographe. Contrairement aux apparences, il ne s’agit pas de néophytes ayant été initiés aux rites de la puberté. Le texte qui accompagne ces photos dans The Juvenile Missionary Herald of the Baptist Missionary Society indique que les masques « ont été abandonnés par les membres « Nlongo » de Kibokolo alors qu’ils s’enfuyaient des villes. Les garçons de notre poste les ont mis pour être photographiés. »18 Les masques zombo du British Museum Onze des douze masques reconnaissables sur la photo de Lewis sont aujourd’hui conservés au British Museum (BM). Ils constituent l’important noyau de la vaste et remarquable collection d’objets zombo du musée, assez rares par ailleurs dans les collections publiques et privées. Une ancienne fiche d’inventaire – une oeuvre d’art en soi – montre ces masques zombo, dessinés avec précision et accompagnés de certains détails relatifs à la coutume longo (fig. 8). Elle indique que les masques ont été consignés en 1905, tout juste deux ans après qu’ils ont été photographiés sur le terrain. Dans une lettre datée du 24 avril 1919 envoyée au « Secutaer sic Ethnographical Dept. British Museum W.C. » (document ethnographique 200, repris sur la liste d’inventaire du BM), le révérend Lewis mentionne deux « ensembles de masques ». Le premier est le groupe de 1905 et le second se compose de deux pièces qu’il s’est procurées luimême « dans le même district du Congo que les Zombo que vous possédez. » Ces deux exemplaires de la collection du BM seront abordés plus loin. En observant la photo de Lewis, on remarque immédiatement que les deux masques à cornes plus ou moins au milieu sont beaucoup plus grands que les autres masques du groupe. On note également que plusieurs exemplaires sont munis de plumes attachées aux casques tandis que d’autres sont pourvus de cornes. Il semble qu’au moins deux types de masques soient illustrés. D’après d’autres traditions comme celles des Yaka ou des Nkanu, nous savons que les masques étaient souvent récupérés de cérémonies antérieures nkanda/longo puis recyclés pour mener une nouvelle « vie » au sein d’un autre camp d’initiation. Le grand masque animal (fig. 2) semble représenter une « vache de brousse » ou un buffle, et l’inventaire du musée mentionne en effet « tête de vache ». Les peuples Yaka et Nkanu confectionnaient un masque similaire appelé mpakasa (buffle), et l’initié qui portait ce masque imitait le comportement de l’animal.19 Les deux grands masques Zombo à cornes du groupe (fig. 2 et 3) possèdent des caractéristiques physionomiques similaires. Par exemple, la forme de l’oeil – mi-clos et la pupille perforée au niveau de la moitié inférieure – est pratiquement identique. De tels détails suggèrent


untitled
To see the actual publication please follow the link above