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Sculpture zombo 121 FIG. 5 : Gwen Elen Lewis, BMS (1853–1909). D’après Hawker, 1911, frontispice. rituels demeura très forte. Les actions qui accompagnaient la diffusion de la nouvelle idéologie – la destruction des lieux de culte et des objets de pouvoir, et les menaces concernant le statut du kitome – suscitèrent plus d’une fois la rébellion de la population indigène. Jan Vansina (1965 : 115) décrit comment les guerres, les pestes et les épidémies décimèrent la population kongo entre 1642 et 1664. Selon les locaux, ces malheurs étaient dus au mécontentement des forces surnaturelles en raison du comportement des moines capucins qui étaient soupçonnés d’ensorceler les gens plutôt que de les protéger contre les actes malveillants des sorcières, ou bandoki (Hilton 1985 : 196). Une deuxième vague d’évangélisation débuta dans la région durant la seconde moitié du XIXe siècle. En 1865, la préfecture apostolique du Congo fut confiée aux Pères du Saint-Esprit (d’origine française), qui évangélisèrent la côte ouest jusqu’en 1888, date à laquelle ils furent expulsés du territoire de l’État indépendant congolais. Pendant ce temps, des missionnaires protestants anglais et américains s’installaient en Afrique centrale.11 Parmi eux figurait la société missionnaire baptiste britannique (BMS, British Baptist Missionary Society), fondée en 1792 et d’abord active en Inde. Ngemba Kavenadiambuko (1999 : 102) écrit : « Les baptistes anglais furent la société protestante la plus importante au Bas-Congo où ils jouent un rôle prépondérant ». Outre le zèle dont ils faisaient preuve pour répandre le gospel chez les Africains, ces hommes manifestaient également de l’intérêt pour la géographie, la langue et les coutumes locales. Ils consignèrent énormément de documents intéressants en la matière. L’un des pionniers de la BMS en Afrique fut Thomas Lewis,12 un Gallois né le 13 octobre 1859 à Whitland, dans le Carmarthenshire. Il intégra le Haverfordwest College en 1880 avec l’intention de devenir missionnaire (Lewis 1930 : 11). Après son adhésion à la BMS, il embarqua pour l’Afrique en février 1883. Il travailla plusieurs années au Cameroun, puis fut envoyé en Angola, où la BMS venait d’entamer ses activités. Il voyagea avec Mme Gwen Elen (1853-1909) pour fonder une nouvelle mission à Kibokolo/Quibocolo, à quelque 20 km au sud de Maquela do Zombo. Le révérend Edward William Price Evans13 décrit son collègue Thomas Lewis comme un « pion majeur lors de trois événements historiques ayant émaillé le développement de cette grande mission – la formation de l’église de San Salvador (la première au Congo), la fondation de l’oeuvre à Kibokolo et l’ouverture du United Training Institute à Kimpese (dont il fut le premier directeur). » Mme Gwen Elen était « l’une de ses collègues au Cameroun » (Anderson 1999 : 398) et devint sa seconde épouse. Elle travaillait comme infirmière, traductrice et s’occupait des femmes. Ses expériences sont relatées dans une autobiographie publiée en 1911 par G. Hawker (fig. 5). Kibokolo fut choisie pour abriter un centre de mission de la BMS – qui allait prendre le nom de « Comber Memorial Station » –14 parce qu’aucune autre société et aucun autre missionnaire n’étaient actifs dans la région et que l’endroit semblait favorable. Il était situé dans un district densément peuplé et à proximité d’un carrefour de routes commerciales importantes (Hawker 1911 : 213–214). Une description de Kibokolo plus précise sur le plan géographique fut publiée dans le magazine The Geographical Journal (1908 : 598), qui reprenait le texte de la conférence de Lewis « The Old Kingdom of Kongo » qu’il donna à la Royal Geographical Society. « Durant mon dernier séjour en Afrique, mon quartier général se trouvait à Kibokolo, à quelque 160 kilomètres par route à l’est de San Salvador et une trentaine de kilomètres au sud de Makela, …. À Kibokolo, nous nous trouvons à 1000 mètres d’altitude, mais en direction de l’est il y a une dépression graduelle vers le fleuve Nkisi, qui se situe à environ 760 mètres. » Le révérend Lewis et sa femme séjournèrent à Kibokolo pendant près de sept ans.15 Les premiers contacts avec les Zombo en 1898-1899 furent plutôt hostiles. Il fallut quelques années pour gagner leur confiance. Plusieurs passages du livre de Mme Lewis (1911 : 202, 208, 217 et 227) font état d’une relation tendue et leurs nouveaux voisins sont décrits comme « un peuple sauvage, timide, méfiant, et la vie à San Salvador, pourtant très rudimentaire, s’approchait plus de la civilisation comparée au barbarisme absolu des Zombo. » Par ailleurs, le couple exprima à de très nombreuses reprises sa stupéfaction et son aversion envers la présence excessive de « fétiches ». Dans ses écrits ultérieurs, Lewis (1908 : 606-607) adopte une approche plus modérée quant aux objets de pouvoir et aux institutions locales : « Après avoir vécu vingt-cinq ans parmi eux, j’estime à présent que derrière ce fétichisme africain se cache une croyance fondamentale en l’existence de Dieu et en la réalité de l’âme humaine … le fétichisme, en tant que religion, est basé sur la vérité scientifique. … tout ce qui touche à la religion indigène n’est pas associé au mal. … la grande majorité des fétiches et des charmes est destinée à se protéger contre le mal, et non à attaquer les innocents. … Les sociétés secrètes, comme la Nkimba, la Ndembo et la Nlongo, unissent les communautés en une armée solide sous le commandement des sorciers-guérisseurs. » Le rite longo (N)longo, l’institution d’initiation et d’enseignement pour les jeunes garçons zombo, semble partager de fortes affinités avec la nkanda,16 qui a fait l’objet d’études plus approfondies. Il


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