Page 120

untitled

DOSSIER Sculpture zombo : le royaume de Kongo et la société missionnaire baptiste 118 Par Annemieke Van Damme-Linseele Les Zombo et le royaume de Kongo Il semble que les Zombo aient autrefois vécu dans l’ancienne province de Mbata (ou qu’ils fussent à tout le moins issus d’une ou plusieurs de ses familles), située sur la rive gauche du fleuve Kwango (Cuango) et faisant partie des six provinces principales de l’ancien royaume de Kongo. Dans un récit écrit au XVIe siècle (Pigafetta et Lopez, 1591, cf. Lacroix, 1992 : 54(36), 62(5) ; Bal, 1963 : 70–71(235)), Odoardo Lopez mentionne les Muzombis (Monsobo(s), Monsobi, ou Mozombos), habitants de « Batta », décrits par leurs contemporains comme étant moins civilisés que les « Maciconghis » (Mocicongo ou Muchicongo) vivant dans la région plus centrale, bien qu’ils parlent la même langue. Les Zombo sont également mentionnés – cette fois sous le nom de Mosombi – dans un ouvrage rédigé au XVIIe siècle par Giovanni Antonio Cavazzi, Istorica Descrizione de’Tre Regni Congo, Matamba and Angola (1687, L. IV : 41, cf. Labat, 1732 : 237). Il les décrit comme faisant partie du « duché » de Mbata, dans le nord-est du royaume de Kongo. À l’époque de la formation de ce royaume à la fin du XIVe siècle, la chefferie de Mbata2 y fut incorporée et devint la « province » de Mbata. Elle conserva une certaine autonomie et sa gouvernance devint le droit héréditaire du clan Nsaku (Van Wing 1959 : 27). Cette famille jouissait de nombreux autres privilèges. Le chef de Mbata recevait le titre FIG. 1 : Congi Regnum (royaume de Kongo) par Gerhad Mercator (1512–1594). La province kongo de Bata (Mbata) est située à l’est du centre, le long du « Lefunda Rio », au sud du fleuve Congo. Gravure sur cuivre sur papier. Publié vers 1630. Northwestern University Library, Collection de cartes d’Afrique. Le plateau de Zombo, situé dans le nord de l’actuel Angola, abrite le peuple éponyme. Le Frère Michel Plancquaert (1932 : 34–36) fait référence à ce peuple en utilisant une légère variante, Zomba (d’après pays des Bazomba), mais Josef Chavanne (1887 : 283) utilise quant à lui le terme N’zaddi pour le plateau, faisant remarquer qu’il se trouve « sur la rive droite du plus grand affluent de gauche du fleuve Kwango ». José Redinha (1962 : 11) a recours à un ethnonyme similaire, Zadis ou N’zadis, que l’on peut traduire par « habitants du fleuve », pour désigner la partie de la population Zombo vivant aux alentours de la commune de Quilo-Futa dans la province d’Uíge.1 de neakon dia nene Kongo, ou nkak’andi a manicongo :3 « grand-père maternel du royaume de Kongo », titre par lequel, selon cet auteur, les fondateurs du royaume de Kongo (besi Kongo) semblaient accepter la supériorité des propriétaires terriens existants, les Nsaku, qui demeuraient les chefs réels (et donc spirituels). Ceux qui accédaient au trône étaient obligés de choisir leur première femme dans la « Maison de Mbata », à savoir le clan Nsaku. Le dirigeant de Mbata (mani Mbata) et son chef religieux (kitome) de la lignée Nsaku ne Vunda faisaient partie des plus importants conseillers du roi (ntinu) de Kongo, et leur présence ainsi que leur vote décisif étaient requis lors de toute nouvelle nomination d’un « responsable » kongo. En l’absence d’un candidat adéquat, le chef de Mbata était habilité à gouverner comme régent. Il était également le seul mani ayant le droit de posséder une armée. Cette prérogative particulière était due au fait que la province de Mbata était considérée comme étant en état de guerre permanent avec ses voisins (Cuvelier, 1946 : 276, 305 ; Van Wing, 1959 : 27).4 Le prestige du mani Mbata prit de l’ampleur et au début du XVIe siècle, il était perçu comme le gouverneur le plus important du royaume de Kongo (Hilton, 1985 : 39). Il devait sa position aux droits de propriété du clan Nsaku sur les sols fertiles de la vallée du fleuve Inkisi. Sa position lui conférait de solides pouvoirs politiques et économiques, mais également une supériorité spirituelle. Sous l’effet de ces conditions favorables, son territoire devint densément peuplé. Il était également traversé par une importante route commerciale, ce qui garantissait de grandes richesses supplémentaires. Certains historiens rapportent qu’à la fin de ce siècle, le mani Mbata avait soumis de nombreux peuples de l’est de la province à son autorité. Selon Plancquaert (1932 : 21), les Zombo mentionnés par Lopez étaient des vassaux du mani


untitled
To see the actual publication please follow the link above