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130 même issus de régions autres que celles où ils travaillaient eux-mêmes. Lors de mon premier cycle à Harvard, où mon intérêt pour les civilisations anciennes commençait à se manifester, j’avais un camarade de chambre, Stuart Cary Welch, qui collectionnait de l’art. Je me suis inspiré de son exemple pour collectionner du matériel issu des cultures précolombiennes du Pérou et des Indiens de la côte Nord-Ouest (des États-Unis). J’ai donné ces oeuvres, il y a longtemps, notamment à l’American Museum of Natural History, et je n’ai jamais collectionné d’objets provenant de la région sur laquelle je travaillais. Cela dit, j’admire les capacités esthétiques des civilisations anciennes. Les artisans olmèques et mayas ont produit des oeuvres d’art sophistiquées. Elles se situent au niveau des peintures de Rembrandt. Il n’y a rien de « primitif » dans la culture matérielle des Olmèques et des Mayas. Le grand art est, par essence, non primitif. Toutefois, il a fallu batailler longtemps – un combat qu’entamèrent les artistes européens d’avant-garde – pour que la valeur esthétique des objets précolombiens soit reconnue. Ces dernières décennies, de formidables expositions d’art précolombien ont eu lieu dans des musées majeurs, ici aux États-Unis et ailleurs, où la sophistication des anciennes cultures des Amériques fut mise en évidence et ouvertement admise. Les archéologues – et les anthropologues – ont pourtant changé leur fusil d’épaule. La plupart des « archéologues de terrain » d’aujourd’hui ne se soucient pas de l’art. Pour eux, les objets matériels des cultures anciennes sont simplement des artefacts. Ils ont rejoint la cause du « nouveau nationalisme », courant selon lequel les pays, aussi fragmentaires soient-ils, sont considérés comme les propriétaires légitimes de tout ce qui est découvert – ou fut découvert – à l’intérieur de leurs frontières contemporaines. La démarche actuelle de l’Archaeological Institute of America (AIA) visant à restreindre la divulgation des artefacts dépourvus de provenance archéologique est ridicule. D’après ce raisonnement, la pierre de Rosette n’aurait pas dû être étudiée car elle ne provenait pas d’une excavation « scientifique »… Les membres de l’AIA font valoir que l’information sur un objet est perdue à quatrevingt quinze pour cent (ils aiment le chiffre 95) si la provenance de l’artefact en question n’est pas avérée. Tout dépend du type d’oeuvre auquel on a affaire. Peut-être que dans le cas de pointes de flèches trouvées par une bande de scouts, une grande partie des informations seront perdues alors qu’elles auraient été glanées autrement. Mais un vase maya accompagné d’un long texte « parle » toujours, indépendamment de l’endroit où il se trouve et de la manière dont il a été découvert. Aujourd’hui, à une époque où il est tellement courant de « niveler » la culture FIG. 5 : Miguel Covarrubias (1904–1957), sans titre (collage de trois tirages gélatino-argentique et de trois dessins à l’encre d’une genouillère cérémonielle olmèque en pierre), vers 1940. Photographies et encre sur papier. 20,3 x 27,7 cm. Avec l’aimable autorisation de la Throckmorton Fine Art, New York. FIG. 6 : Monument 34 (figure à moitié agenouillée), San Lorenzo Tonochtitlán, Veracruz, Mexique, 1400 - 1000 av. J.-C. Basalte. H. : 77,7 cm. Museo Nacional de Antropología, Mexico (10-81348). Photo © Consejo Nacional para la Cultura y Las Artes – Instituto Nacional de Antropología e Historia – Mexico. Javier Hinojosa. PERSONNALITÉ


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