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PERSONNALITÉ Michael D. Coe : professeur émérite en études mésoaméricaines Michael D. Coe, professeur émérite d’anthropologie Charles J. MacCurdy One de l’Université de Yale, est l’un des plus éminents spécialistes au monde des anciennes cultures de Mésoamérique. Il a mené une longue et fructueuse carrière qu’il initia avec des fouilles archéologiques sur la côte pacifique du Guatemala, une région riche en sites liés au début de la période formative. C’est sur le site olmèque de San Lorenzo Tenochtitlán, sur la côte est du Mexique, près de la ville de Veracruz, qu’il accomplit son grand « travail de terrain », selon ses propres termes. Parmi d’autres prouesses, il creusa la terre à mains nues pour en extraire l’une des sculptures olmèques les plus prisées, Monument 34, d’autant plus célèbre après sa présentation dans l’exposition Olmèques : chefs-d’oeuvre colossaux de l’ancien Mexique, Los Angeles County Museum of Art fin 2010. Coe a aussi largement contribué au déchiffrement des glyphes mayas. Fait rare pour un anthropologue, il fut également actif dans le domaine de l’histoire de l’art, soucieux – et même convaincu – de la nécessité de considérer l’importance de la dimension artistique des artefacts créés par des civilisations anciennes comme les Olmèques et les Mayas. À ces mérites, il convient d’ajouter une pléthore d’ouvrages : des monographies académiques, des catalogues d’art pour musées, des essais d’introduction aux cultures anciennes de Mésoamérique. Parmi ses publications les plus importantes figurent The Jaguar’s Children: Pre-Classic Central Mexico (Museum of Primitive Art, 1965), Lords of The Underworld: Masterpieces of Classic Maya Ceramics (Princeton University Press, 1978), In The Land of The Olmec (avec Richard Diehl, University of Texas Press, 1980), Breaking The Maya Code (Thames and Hudson, 1992 et 1999), et The Art of The Maya Scribe (avec Justin Kerr, Par Forrest D. Colburn FIG. 2 : Miguel Covarrubias (1904–1957), Sans titre (tête colossale olmèque découverte à Veracruz), vers 1940. Crayon de couleur sur papier. 35,6 x 24,5 cm. Avec l’aimable autorisation de la Throckmorton Fine Art, New York. Thames and Hudson, 1997). Son attention s’est portée également sur le grand site cérémoniel d’Angkor au Cambodge, en raison des fortes similitudes entre les civilisations d’Asie du Sud-Est et celles des Amériques. Cet intérêt est à l’origine de la parution de Angkor and The Khmer Civilization (Thames and Hudson, 2003). Par une froide journée d’hiver, Coe descendit de New Haven pour me rendre visite à New York. Nous avons bavardé dans mon appartement avant de sortir prendre un somptueux repas dans un restaurant franco-vietnamien. Forrest Colburn : Quels ont été les temps forts de votre longue carrière ? Parmi tout ce que vous avez accompli, qu’est-ce qui vous procure le plus de satisfaction ? Michael Coe : Je suis très fier de mon activité de professeur à Yale, de ces étudiants que j’ai pu attirer vers mon domaine et que j’ai contribué à former. J’ai joué un rôle dans la formation de quelques-uns des meilleurs spécialistes qui travaillent aujourd’hui sur les civilisations olmèque, maya, zapotèque et aztèque. Nous avons participé à de nombreux séminaires ensemble. Je me considère un peu comme leur père : protecteur et fier. Et bon nombre de mes étudiants forment désormais eux aussi des spécialistes, donc je suis aussi dans la peau d’un grand-père. En ce qui concerne ma propre activité de spécialiste, c’est mon travail sur les Olmèques qui me procure le plus de fierté. Les deux experts que j’ai toujours le plus admirés sont Miguel Covarrubias et Matthew Stirling. Hélas, je n’ai jamais rencontré Covarrubias, mais je connaissais Stirling. Tout comme eux, je suis intéressé – et je l’ai toujours été – par le « début ». J’ai étudié la cosmologie et la poésie aztèques, et les Aztèques me fascinent, mais ce qui m’attire plus que tout, c’est l’autre extrémité de l’horizon temporel. Quelles sont les origines des civilisations ? En Mésoamérique, tout commence avec les Olmèques. Ils constituent, d’après Covarrubias, la « culture mère ». Stirling disait qu’il était devenu « accro » aux Olmèques après avoir vu un petit objet en jade lors d’une exposition dans un musée allemand. Je suppose qu’il s’était demandé : « Qui a créé un si bel objet ? » Après avoir travaillé sur la côte pacifique du Guatemala, j’ai éprouvé de la curiosité pour les régions marécageuses du sud-est du Mexique, là FIG. 1 : Michael D. Coe, New York, 2012. Photo © Forrest Colburn.


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