DOSSIER 114 de Carl Einstein Negerplastik constitua, selon Wardwell, l’une des meilleures sélections effectuées par Gordon et Hall à l’époque28 (fig. 29, 30, 31 et 32). Toutefois, les discussions interminables entre de Zayas et Gordon au sujet de cette vente furent désastreuses pour la collaboration entre de Zayas et Vignier, qui s’acheva en 1920.29 Jusqu’à la mort accidentelle de George Gordon en 1927, le PM continua sa politique active d’acquisition, mais la collection congolaise ne s’accrut qu’à peine à partir du début des années 1920. Grâce à des archives soigneusement conservées,30 l’actuel University of Pennsylvania Museum constitue une mine d’informations essentielles pour les chercheurs s’intéressant aux acquisitions muséales durant la première moitié du siècle. En se procurant leurs oeuvres auprès d’une multitude de fournisseurs – marchands de matériel ethnographique, galeries d’art, missionnaires, explorateurs – George Gordon et Henry Hall purent se permettre de passer d’une méthode de collecte à une autre, et furent en mesure d’accéder à plusieurs collections fondamentales d’oeuvres du Congo au cours des premières décennies du XXe siècle. Leur expertise et l’intérêt profond qu’ils portaient à toutes les cultures leur permirent d’apprécier les objets pour leurs qualités artistiques, peaufinant leurs pratiques d’acquisition au fil des années, tout en s’adaptant aux nouvelles tendances et aux nettes variations de prix. La collection qu’ils ont construite traduit leur ouverture d’esprit et demeure aujourd’hui le témoin du caractère humaniste de la philosophie de collection du Penn Museum. NOTES 1. Neil MacGregor, « 2600 ans d’histoire dans un objet ». TED Global 2011, vidéo filmée en juillet 2011, mise en ligne en février 2012. ttp://www.ted.com/talks/neil_macgregor_2600_years_of_history_ in_one_object.html. Sur la notion de la biographie des objets, voir l’article de l’anthropologue Igor Kopytoff « The Cultural Biography of Things: Commoditization as Process » dans The Social Life of Things: Commodities in Cultural Perspectives. Appadurai, Arjun ed. Cambridge : Cambridge University Press, 1986, p. 64- 91. 2. Cet article reprend une conférence présentée pour la première fois par Yaëlle Biro et Constantin Petridis au Festival de l’histoire de l’art 2012 à Fontainebleau, France, intitulée « Une collection d’art africain méconnue : les arts du Congo à l’University of Pennsylvania Museum, Philadelphie » et donnée le 3 juin 2012. 3. Allen Wardwell. African Sculpture from The University Museum, University of Pennsylvania. Philadelphie : Philadelphia Museum of Art, 1986. 4. Wardwell, ibid, p. 16. 5. University of Pennsylvania. The Museum Journal. « Philadelphie: The Museum. Frontispiece, 1912-1918 ». Le langage utilisé dans ces déclarations a été légèrement modifié au fil des années, mais le sentiment est demeuré identique. Fig. 26 : Figure masculine. Peuple mbole, République démocratique du Congo. Bois, pigment. H. : 76,2 cm. Collectée sur le terrain par C. Blank au Congo belge avant 1920. Achetée à W. O. Oldman, Londres, 1924 (AF 5188). Avec l’aimable autorisation du Penn Museum. Ce type de figure était employé très certainement dans le cadre des pratiques d’enseignement d’une société secrète appelée Lilwa. Fortement hiérarchisée, la Lilwa remplissait plusieurs fonctions dans les domaines rituel, éducatif, social, politique, économique et juridique. La sculpture semble représenter un homme condamné à mort pour avoir transgressé les lois de l’association ou perturbé l’ordre public. Elle serait montrée aux garçons subissant leur initiation au sein de la société, afin de leur rappeler leurs obligations et le serment du secret qu’ils ont prêté. Les sculptures étaient aussi parfois transportées sur un brancard dans le but de protéger la communauté contre le malheur et le préjudice. Pour plus d’informations, voir en particulier Daniel P. Biebuyck dans Gustaaf Verswijver, et al. (éd.). Treasures from the Africa-Museum, Tervuren. Tervuren : Royal Museum for Central Africa, 1995. C.P. Fig. 27 (PAGE SUIVANTE) : Figure masculine. Peuple hungaan, République démocratique du Congo. Bois, os, laiton. H. : 92,5 cm. Collectée sur le terrain par C. Blank au Congo belge avant 1920. Achetée à W.O. Oldman, Londres, 1924 (AF 5183). Avec l’aimable autorisation du Penn Museum. Les figures hungaan servaient à protéger les sanctuaires abritant les rituels, gérés conjointement par un chef de village et un expert en rituel. Placées sur une plateforme jouxtant le sanctuaire, les figures étaient à l’origine accompagnées d’un amas de matériaux magiques. Comme de nombreux objets variés à l’intérieur du sanctuaire, les figures protectrices étaient utilisées lors des rituels effectués par leurs gardiens pour promouvoir la fertilité, garantir le bien-être, et assurer la longévité. La remarquable crête de cette figure s’apparente à une vraie coiffure ou une perruque. Autrefois largement répandu et partagé par différents peuples à travers toute la région, ce style de coiffure marquait le statut et le prestige. Le mouvement des mains soutenant le menton identifie le personnage comme un chef plongé dans la réflexion et la contemplation, méditant sur ses responsabilités. Pour plus d'informations, voir en particulier Arthur P. Bourgeois dans Erna Beumers and Hans- Joachim Koloss (éds.), Kings of Africa. Maastricht : Foundation Kings of Africa, 1992. C.P.
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