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99 EN PLEINE MER Lorsque les voyageurs austronésiens ont traversé pour la première fois cette étendue de plus de trois cents kilomètres menant aux îles Santa Cruz, ils entrèrent sur un territoire vierge. Ce voyage trouve ses racines sur l’archipel de Bismarck, où une culture appelée Lapita émergea aux alentours de 1600 av. J.-C. Des archéologues ont découvert la preuve, en particulier sous la forme de styles spécifi ques de céramiques, que ces peuples avaient navigué relativement vite à travers les Salomon et cette vaste étendue, mais également très loin dans le Pacifi que. Ils auraient atteint la Nouvelle-Calédonie (fi g. 15) vers 1200 av. J.-C., les Fidji vers 1200-1000 av. J.-C. et les Tonga / Samoa aux alentours de 900 av. J.-C. La monnaie de plumes rouges des îles Santa Cruz (fi g. 14) est un autre exemple de produit spécialisé présent au sein d’un réseau commercial vaste. Les efforts conjoints de nombreux artisans et commerçants, vivant dans des régions séparées par des centaines de kilomètres d’océan, étaient nécessaires pour fabriquer cette précieuse monnaie qui était utilisée lors de rituels comme les échanges de dots. La véritable culture polynésienne s’est développée après la colonisation des Tonga et des Samoa. La réponse à la question récurrente de la provenance des Polynésiens est donc très simple : ils ne sont pas venus d’ailleurs. Ils sont devenus des Polynésiens en Polynésie. Lorsque l’expansion a repris, les îles centrales de la Polynésie de l’Est (les îles de la Société et les Marquises) furent colonisées sans doute vers 600 av. J.-C. Ce nouveau foyer à l’est de la Polynésie est ensuite devenu le point de départ de voyages vers les terres les plus éloignées situées en pleine mer : Rapa Nui (île de Pâques, 300 apr. J.-C.), Hawaï (400 apr. J.-C.) et Aotearoa (Nouvelle- Zélande, 1000 apr. J.-C.) (fi g. 16). Plus loin vers l’ouest, le périple maritime sans doute le plus étonnant entrepris par les Austronésiens les mena de l’autre côté de l’océan Indien jusqu’à Madagascar en 830 apr. J.-C. environ. Bien qu’elle se situe au large des côtes d’Afrique, Madagascar abrite des populations essentiellement austronésiennes et non africaines – une distinction que l’on retrouve clairement dans les langues, les cultures et les arts de cette immense île. L’exposition s’achève avec deux oeuvres de Madagascar, une fi gure commémorative austronésienne classique et un textile en soie orné de motifs exceptionnellement complexes. Ces deux oeuvres résument parfaitement le propos fondamental de l’exposition : donner aux visiteurs une occasion unique d’admirer en un seul et même lieu un ensemble remarquable d’oeuvres issues de cette multitude de territoires océaniens colonisés par les migrants de langue austronésienne. FIG. 14 (CI-DESSUS) : Monnaie nendes. Îles Santa Cruz, îles Salomon. Milieu du XXe siècle. Plumes de méliphagidés (myzomela cardinalis), fi bres végétales, feuilles de palmier, écorce et coquillages. 68 x 6,3 cm. Don de Bennet Mermel, Fowler Museum at UCLA, inv. X99.45.1a, b. Avec l'aimable autorisation du Fowler Museum at UCLA, photo : Don Cole, 2016. FIG. 15 (À GAUCHE) : Gardien de porte d'une maison de chef. Nouvelle- Calédonie. XIXe siècle. Bois. H. : 170 cm. Don du Wellcome Trust, Fowler Museum at UCLA, inv. X65.7433. Avec l'aimable autorisation du Fowler Museum at UCLA, photo : Don Cole, 2016. FIG. 16 (À DROITE) : Cape kakahu. Maori, attributé à Rotorua, Aotearoa (Nouvelle- Zélande).1880-1910 ? Lin de Nouvelle-Zélande (Phormium tenax), plumes de hereru (Hemiphaga novaeseelandae) et de kaka (Nestor meridionalis). 140 x 100 cm. Don du Wellcome Trust, Fowler Museum, inv. X65.10283. Avec l’aimable autorisation du Fowler Museum at UCLA, photo : Don Cole, 2014. L’art des Austronésiens


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