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HOMMAGES 159 Peter Furst souvenir. Aussi nombreuses furent les conquêtes que par pudeur il ne dévoilait que pour notre plaisir et un peu pour le sien, il était fi dèle à celle qu’il aimait. Avec Mephisto acoquiné en catimini par coquetterie, toutes ces années n’ont eu que le printemps pour unique saison. Aujourd’hui ses rêves ont eu raison de la réalité. Lui qui nous laissait croire être séduit par l’enfer savait-il que le bon Dieu aujourd’hui impatient l’attend pour s’amuser au Paradis. Daniel Hourdé l’éclat des poignards », mais où ceux des femmes ont pour lui celui de l’espoir, il navigue comme un poisson dans l’eau auquel une improbable métempsychose semble avoir condamné ce pécheur impénitent. La femme nous y voilà. Sa vraie passion, son sacerdoce. Jamais je n’ai connu d’homme qui aima autant passionnément les femmes, sans équivoque et sans remords. Elles étaient toutes miraculeuses. « Mais regarde, regarde mon vieux, regarde comme elles sont belles ! » lançait-il à chaque apparition. Une sorte de Don Juan idéal. Sans hélas pouvoir me fi er à mon expérience, ce séducteur laissait ce qui est rare un merveilleux En mars dernier, l’anthropologue culturel Peter T. Furst s’est éteint paisiblement à Santa Fe. Il avait quatre-vingt-douze ans et avait mené une vie créative et productive. Peter a enseigné, oeuvré pour la recherche, écrit, produit des documentaires et organisé des expositions. Il était par nature curieux, intéressé et intéressant. Ouvert d’esprit, il était capable de réunir de nombreux univers différents. Bien qu’il ait axé ses travaux sur les cultures précolombiennes, leurs artefacts, les populations indigènes du continent américain et leurs systèmes de croyances, Peter était un fervent collectionneur d’art africain. Il avait l’esprit et « l’oeil ». Peter pouvait aisément s’extasier devant un bel objet de la même manière qu’il était fasciné par une idée novatrice, et il possédait de surcroît un merveilleux sens de l’humour. Je connaissais Peter depuis un long moment, trente-six ans exactement. Je n’ai jamais cessé d’apprendre à son contact et j’ai toujours apprécié son agréable compagnie. Il me manquera, tout comme il manquera à beaucoup d’autres. Né à Cologne en 1922, Peter eut la clairvoyance de quitter l’Allemagne en 1937 avec sa famille. Ils arrivèrent tout d’abord au Royaume-Uni avant de s’installer aux États-Unis. Durant la Seconde Guerre mondiale, Peter servit dans l’armée américaine. Il revint en Europe en tant que correspondant pour le journal Stars and Stripes. Il était présent à Dachau lors de la libération du camp de concentration et couvrit le sujet pour le journal. Après la guerre, Peter rentra en Californie où il travailla pour la United Press comme producteur de fi lms. Alors qu’il réalisait des documentaires pour une émission télévisée intitulée Expeditions, il fi t la connaissance de Donalda – « Dee » – qu’il épousa. Malheureusement, elle trouva la mort dans un accident de voiture. Leur fi ls Robert « Bobby » Furst était encore jeune à l’époque. Peter se remaria par la suite avec Jill Leslie, à l’époque où il enseignait à la State University d’Albany. Sous le nom de Furst and Furst, ils rédigèrent le livre remarqué Pre- Columbian Art of Mexico. Peter et Jill se séparèrent après vingt-cinq ans de vie commune. La longue relation entre Peter et les cultures indigènes du continent américain naquit au Los Angeles County Museum of Natural History. En 1964, il y organisa la première exposition aux États-Unis consacrée à l’or précolombien, rassemblant des artefacts du Mexique, d’Amérique centrale et de la région andine d’Amérique du Sud. En 1968, il monta une autre exposition marquante, cette fois sur l’art des Indiens Huichol, un petit groupe indigène traditionaliste peuplant la Sierra Madre occidentale au Mexique. Outre son activité au musée, Peter mena des études de doctorat en anthropologie à la University of California, Los Angeles (UCLA), puis travailla dans le Latin American Center de l’université. Peter poursuivit ensuite sa carrière à la State University of New York à Albany, à la University of Pennsylvania Museum of Archaeology and Anthropology et au Museum of Indian Arts and Culture / Laboratory of Anthropology (à Santa Fe, au Nouveau-Mexique). Peter était également un auteur prolifi que. Ses nombreux ouvrages et articles sont réputés pour son recours judicieux à la recherche ethnographique – en sa qualité d’anthropologue – afi n d’éclairer le sens caché ou perdu des artefacts précolombiens. Peter a encouragé notre intérêt pour les traditions artistiques des cultures éloignées et isolées et nous a aidés à leur donner un sens aujourd’hui. Je me considère comme l’un de ses innombrables étudiants. C’était un professeur, au vrai sens du terme. Spencer S. Throckmorton


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