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HOMMAGES André Blandin André Schoeller Ah si Dédé nous était conté ! Ces quelques mots pour vous parler de cet homme singulier qui fut un de mes amis les plus chers et dont la vie est une performance romanesque, André Schoeller. Mes premiers souvenirs d’André remontent à la galerie de la rue Miromesnil où j’avais aperçu, au premier étage, briller entre les toiles,des reliquaires Bakota. Il expose en précurseur Atlan, Castillo, Gioli, Fautrier, Messagier, Rebeyrolle, Tal-Coat. Aimant à confronter les idées et les hommes, il sera parmi les premiers à juxtaposer les masques nègres aux tableaux modernes, plus tard Monet et Sam Francis dans la galerie Larock-Granoff. Sa compétence, plus instinctive que théorique, lui valut rapidement l’estime et la reconnaissance, tant le goût, l’oeil et le talent se trouvent rarement associés. Il devient le spécialiste attitré de l’oeuvre de De La Fresnay, Lanskoy, Picasso. Il est l’expert de nombreuses ventes prestigieuses, tant de tableaux (Renan, Louis Carré, Dora Maar) que d’art primitif avec Charles Ratton et Guy Loudmer (vente Breton, Rasmussen, Tzara). Dès lors, lui sourit le tout-Paris de ces années glorieuses. Peintres, sculpteurs, comédiens et comédiennes « comme de bien entendu » craquent au charme canaille, à l’entregent certain, à l’humour et à l’humeur assassins de ce personnage romanesque plus vrai qu’au cinéma. André Schoeller, alias Dédé pour les intimes. Séducteur, friand de réciprocité, il adore les vedettes, elles l’adorent 158 gestion fi nancière de la société chargée du déplacement des populations, principalement Baulé, suite à la mise en eau du barrage de Kossou, ce qui lui valut quelques inimitiés. Son franc-parler et son allergie aux compromis en faisait un personnage hors-norme, très fi dèle en amitié et, parfois, à la rancune tenace. Ses collectes et ses recherches sur le terrain se concentrèrent, avec le temps, sur les bronzes d’Afrique de l’ouest. Il accomplit plusieurs voyages au Burkina Faso et au Mali. C’est à son retour en France en 1980 qu’il publiera son ouvrage de référence Bronzes et autres alliages. Vinrent ensuite Quatre cents objets de la vie quotidienne et Fers noirs de l’Afrique de l’ouest. Son épouse Gabrielle l’a accompagné jusqu’à la fi n avec un dévouement sans borne. Repose en paix, mon ami, dans le somptueux cimetière paysagé d’Aix-en-Provence, lieu magique que tu as choisi avec ton goû t des belles choses. Alain Dufour à leur tour. Mais n’est-il pas des leurs ? De cette époque, il ne rate ni ne regrette rien, devient l’ami d’Édith Piaf, Jean Cocteau, Charles Aznavour, Pierre Brasseur, et de toutes les belles Américaines, Ava Gardner, Maria Felix. Rencontre nombre de personnalités aux caractères bien trempés parce que forgés dans la fournaise du siècle précédent. Vamps et vampires, jolies mômes et beaux bandits dansent dans son imaginaire au rythme de sa fantaisie. Il fraye avec les meilleurs marchands et collectionneurs : Charles Ratton, René Rasmussen ; lie des amitiés durables avec Pierre Larock, Merton Simpson, Jean-Marie Andriveau, Claude Bernard, Vivianne Jutheau Dewitt, Denyse et Philippe Durand-Ruel, Arman et bien d’autres, parfois virulentes, avec Hubert Goldet, Alain de Monbrison et moi-même. Jeune homme persistant, toujours fringant, il aime les costumes et les tanks. D’une insolence souvent propice à l’invective ou à la rixe, superbe dilettante, il préfère le sulfure à l’argent et plus cigale que fourmi, se trouvant parfois démuni mais toujours bien pourvu, il maintient son allure. Il installe ses quartiers généraux aux alentours de l’Hôtel Drouot. Dans l’univers impitoyable qu’est la jungle du dit Hôtel, tel un lion dont le destin lui a donné le coeur, le tempérament fauve, les rugissements imprévisibles, il règne en prédateur exquis des objets et des muses. Immergé dans ce monde où, comme le dit le poète, « les sourires ont Il s’en est allé par une belle journée de septembre, dans sa Provence natale. De 1957 à 1980, André Blandin fut un acteur passionné du marché de l’art africain à Abidjan, en Côte d’Ivoire. C’est en 1965 que je fi s sa connaissance dans une galerie du plateau, non loin du « Bardon », qui était l’épicentre du marché de l’art ivoirien. Curieux de tout et ouvert à toute forme d’art, il collectait inlassablement les objets les plus divers des cultures Baoulé, Dan, Guéré, Senufo, Agni, toujours avec le souci du beau et de l’authentique. Homme intègre au caractère entier, il s’occupa pendant plusieurs années de la


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