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FIG. 36 (CI-CONTRE) : Amulette, le chasseur. Lumbu, Gabon. Bois. H. : 9 cm. Ex-coll. Paul Guillaume ; Stephen Chauvet ; Anne et Jacques Kerchache ; Ana et Antonio Casanovas. Collection privée. Avec l’aimable autorisation d’Ana et Antonio Casanovas. FIG. 37 (CI-DESSUS) : Amulette, personnage féminin. Lumbu, Gabon. Bois. H. : 9 cm. Musée Barbier-Mueller, Genève, inv. 1019-52. © Musée Barbier-Mueller, Genève, photo : studio Ferrazzini Bouchet. 126 est tout en rondeurs (fi g. 25) : la mère est debout, sa coiffure est un gros chignon se terminant en pointe ; parée de colliers annelés et de bracelets, elle porte le bébé en bandoulière au moyen d’une lanière tressée. L’autre amulette, tout imprégnée de sérénité, représente une mère assise avec son enfant dans le dos s’accrochant de ses deux mains à sa poitrine ; sa coiffure-casque s’attache sous le menton28 (fi g. 26). Une amulette posée sur un entrelacs symbolisant le noeud d’un jonc aux propriétés magiques représente une mère de toute beauté (fi g. 33) : agenouillée, elle allaite son enfant ; trois rangs de petits carrés scarifi és ornent l’arrière des épaules jusqu’à la colonne vertébrale. Du même atelier que cette maternité, posée aussi sur un entrelacs, une amulette de grande qualité (fi g. 30) fi gure un tambourinaire, personnage mythique de la suite de la divinité Bunzi29. Il a une coiffure non striée à deux coques avec de petites couettes sur les côtés comme les tambourinaires du musée Dapper (fi g. 28) et de la collection Horstmann (fi g. 31). Celui du musée des Beaux-Arts de Caen, à la coiffure en pointe, repose sur un entrelacs orné d’une frise de petits losanges (fi g. 29). Il porte un petit chapeau ou un bonnet aux bords roulés que l’on retrouve sur une autre amulette en position agenouillée, un lien torsadé autour du buste (fi g. 27)30. Certains tambourinaires, de patine sombre, arborent le même type de collier et de ceinture qui retient le tambour. DOSSIER Dans un autre type d’amulette, le personnage est sur un anneau. Un très beau tambourinaire représentatif de cette typologie est celui de la collection Malcolm31. Il est caractérisé par une harmonieuse queue de cheval et un gros collier rehaussé de losanges (fi g. 32). Sur une autre pièce, le personnage tient un objet entre les mains : sa coiffure-casque est d’une grande élégance et son visage très fi n (fi g. 35). À côté de ces typologies habituelles, le corpus connu d’amulettes lumbu comprend aussi quelques exemplaires rares. L’objet exceptionnel reproduit en fi gure 36 en est un32 : il représente un homme debout tenant un animal sous le bras et un bâton, ce qui est peu commun. Une autre pièce atypique et puissante ayant appartenu à Merton Simpson a un intérêt anthropologique car elle dépeint la pratique culturelle du sacrifi ce humain : un père debout étouffe une petite fi lle parée de bracelets ; allongée, elle lui tient le bras tandis que la mère retient l’autre bras du père33. Une autre amulette atypique sur un demi-entrelacs montre deux personnages dans une pirogue : une femme fume la pipe et un homme pagaye. L’objet passa en vente chez Sotheby’s Paris le 8 juin 2011 (lot 249), tout comme une pièce exceptionnelle (lot 3) sur entrelacs qui fi gure un esclave sur un tabouret ; une fourche torsadée appelée « bois mayombe » le retient au cou et aux mains. Une dernière amulette (fi g. 37) représente une femme debout les jambes fl échies, une hotte dans le dos ; elle tient de ses deux mains la bande de portage (mukuta) qui repose sur le sommet du crâne et qui – tel un diadème – se confond avec la coiffure. CONCLUSION Ce corpus de chefs-d’oeuvre de la statuaire lumbu composé de statuettes rituelles, de reliquaires et d’amulettes révèle la prodigieuse diversité de l’art du peuple lumbu, tout en fi nesse et nuances, ainsi que la spécifi cité culturelle de son style. La diffi culté à déterminer l’origine de certaines fi gurines – attribuées parfois aux Punu ou aux Vili – pourrait être due à l’importance des échanges commerciaux, culturels et artistiques. À cette incertitude répond celle de leur usage qui a évolué au XIXe siècle pour disparaître en partie dès 1910. Un siècle après les découvreurs de « l’art nègre », nous sommes toujours séduits par l’élégance de la statuaire lumbu, un grand art raffi né et « classique ». L’esthétique n’y est pas un revêtement, mais fait partie intégrante de la culture traditionnelle kongo. REMERCIEMENTS Je tiens à exprimer ma reconnaissance à Yaëlle Biro, Isabelle Calvache, Ana et Antonio Casanovas, Bernard Dulon, Danielle Dumon, Armenian Gassia, Max Itzikovitz, Paola Ivanov, Christophe Marchetau, Anne- Joëlle Nardin, Diane Pelrine, Sandra Prill, Laura Seidenfeld, Heinrich Schweizer, ainsi qu’à Christian Stenersen pour son aide précieuse dans le travail minutieux d’édition et de relecture.


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