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Dès 1919, l’album de la collection d’art africain de John Quinn1 inclut deux clichés de la même statue lumbu d’une mère posant sa main sur la tête de son fi ls (fi g. 1 et 2). L’un est la planche d’ouverture2 : la statue lumbu, aux yeux clos, présentée telle une oeuvre prestigieuse, trône au milieu de fi gures senufo, baga et baoulé ; elle atteste l’art lumbu révélé au tout début du XXe siècle. De même, quelques années auparavant, l’exposition Statuary in Wood by African Savages: The Root of Modern Art, organisée à New York en 1914 dans la galerie 291 d’Alfred Stieglitz offrait à l’appréciation esthétique des visiteurs, entre autres objets, une cuiller lumbu à la coiffure-casque typique ayant appartenu au marchand parisien Paul Guillaume3. Ces objets lumbu que les marchands de la première génération et hérauts de l’avant-garde – Paul Guillaume, Joseph Brummer, Marius de Zayas et Robert J. Coady, parmi d’autres – revendiquaient en tant qu’oeuvres d’art, avaient pourtant été collectés comme de simples souvenirs. Rapportés du Congo par des commerçants, des administrateurs 114 coloniaux ou encore des missionnaires, les témoignages de la culture matérielle du peuple lumbu n’avaient guère fait l’objet d’enquêtes de terrain au moment de leur collecte. Certains objets avaient même été simplement désignés comme « kongo » dans les expositions coloniales et universelles des premières décennies du XXe siècle. Il est évident que des recherches s’imposent dans ce domaine. La statuaire lumbu est surtout composée de statues fétiches (nkisi), de reliquaires (mbumba) et d’amulettes (muswinga). Les kisi et les mbumba étaient entreposés dans des paniers sur les autels de sanctuaires ; certains faisaient partie des objets rituels des nganga, les devins-guérisseurs. En lien avec les esprits de la nature et des ancêtres, La statuaire lumbu un art tout en fi nesse révélé au début du XXe siècle FIG. 1 et 2 : Charles Sheeler (1883-1965), planche d’ouverture et planche intérieure de l’album John Quinn d’art africain, 1919. Épreuve gélatino-argentique. Museum of Fine Arts, Boston. Prêteur anonyme (L-R 2689.2001). The Lane Collection. Avec l’aimable autorisation du Museum of Fine Arts, Boston. Par Charlotte Grand-Dufay DOSSIER


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