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81 Et dans cette salle, les correspondances qui s’entrecroisent sont celles qui relient quelques-uns des plus importants chefs-d’oeuvre et ateliers de l’art africain. Dans ce cas, comme toujours, citer l’un plutôt que l’autre n’est qu’une question de goûts. Certains seront sans doute impressionnés par les deux sculptures Chokwe (fi g. 4) – probablement dues à deux artistes différents actifs dans ce que Marie- Louise Bastin a appelé l’« Atelier de Moxico » –, ou par la maternité kongo yombe reproduite dans le catalogue à la page 103 qui, comme l’écrit Bassani « a de nombreux points communs avec une typologie analogue attribuée au Maître de Kasadi ». Nous avouons avoir été particulièrement frappés par le fétiche à clous de la collection Horstmann (fi g. 5), l’une des meilleures réalisations issues du fameux atelier du fl euve Chiloango, dans lequel ont travaillé deux ou trois maîtres auxquels nous devons les chefs-d’oeuvre (une douzaine en tout) de cette typologie. Cela dit – répétons-le – il est diffi cile de retenir une pièce plutôt qu’une autre dans cette première salle tant elles méritent, toutes, le statut de chefs-d’oeuvre : du cavalier dogon de la collection Dodier à la cuiller anthropomorphisée Dan (fi g. 7), semblable à une oeuvre dadaïste ; de la fi gure d’ancêtre hemba (fi g. 6) à la sculpture bamana (fi g. 8) qui, comme il est dit dans le catalogue, pourrait « parfaitement illustrer l’affi che d’une exposition sur le Cubisme ». Après cette saisissante section initiale, le parcours de l’exposition se poursuit par l’évocation du rapport de L’Europe avec l’Afrique à travers deux périodes clés : d’une part l’époque des voyages d’exploration et, de l’autre, l’expédition punitive de 1897, qui marqua la fi n du royaume de Bénin, un des derniers États qui soient parvenus à échapper à la domination coloniale. Ces deux moments de contacts sont documentés tant par les ivoires afro-portugais (XVe - XVIe siècle), parmi lesquels se distinguent la salière sapi-portugaise du Maître de l’Exécution Symbolique ou l’oliphant et les cuillers en ivoire des collections Médicis de Florence, que par les têtes (fi g. 9) et les plaques en laiton (XVIe - XIXe siècle) qui décoraient le palais royal de Benin et qui, prises par les Anglais comme butin de guerre, fi nirent en partie au British Museum et furent pour l’autre partie vendues, permettant de réaliser un bénéfi ce qui servit à couvrir les frais de l’expédition punitive. Les pièces présentées dans cette deuxième salle – tout comme certaines oeuvres remontant au VIIe siècle de notre ère et fi gurant dans d’autres sections de l’exposition – attestent de la profondeur historique de l’art africain. Elles mettent en évidence également la manière dont les artistes africains parvinrent rapidement à intégrer des matériaux et des stylèmes européens, mais aussi combien leur habileté fut appréciée des navigateurs portugais, PAGE PRÉCÉDENTE FIG. 5 : Figure nkonde. Kongo, groupe yombe, RDC ou Cabinda. Fin du XIXe – début du XXe siècle. Bois, miroir, fer et ingrédients magiques. H. : 110 cm. Collection Horstmann. © H. Schneebeli – A. Fritschi. FIG. 6 : Figure d’ancêtre. Hemba, RDC. XIXe – début du XXe siècle. Bois et textile. H. : 65, 5 cm. Collection privée. © Hughes Dubois. FIG. 7 (À GAUCHE) : Cuiller. Dan, atelier de la région de Man, Côte d’Ivoire. XIXe siècle – début du XXe siècle. Bois et métal. H. : 52 cm. Collection Marceau Rivière. © Pascal Barrier. FIG. 8 (CI-CONTRE) : Figure féminine. Bamana, Mali. XIXe siècle. Bois. H. : 59,5 cm. Collection Horstmann. Photo extraite du catalogue p. 23, édité par 24 Ore Cultura. FIG. 9 (À DROITE) : Tête commémorative. Bini ou Edo. Ancien royaume de Bénin, Nigeria. XVIe – XVIIe siècle. Laiton. H. : 28 cm. Reiss-Engelhorn-Museen, Mannheim, inv. IV Af 3093. © Reiss-Engelhorn-Museen, Mannheim, photo : Carolin Breckle. La terre des esprits


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