Page 115

T76Fr_internet

Le style « Holly Keko » 113 casque » de la tête soutenue par un cou puissant est mise en évidence de profi l par la coiffure à crête centrale, attribut des guérisseurs birifor que Magnuor cherche à styliser pour l’évoquer au mieux. Les maxillaires bien accusés le sont davantage par la position très basse des oreilles situées, elles, en plein milieu de l’évidente courbure qui relie la pointe du menton à celle de la petite queue de la coiffure. La « paternité » teébò du style transparaît tant par l’air « ascétique » du visage que par le modelé prononcé des formes, dont le mouvement suggéré, bien perceptible de profi l, donne à ces effi gies une souplesse inattendue (fi g. 9). De fait, le corps fuselé, aux pectoraux proéminents, reproduit le mouvement typique teébò des bras jetés en arrière et des jambes légèrement fl échies, marquées par la saillie des genoux. En revanche, la manière dont les bras s’emboîtent dans les épaules et la représentation évidente des clavicules comme de l’olécrane sont caractéristiques de ce style en particulier. Cet ensemble de détails formels devenus distinctifs du style sera repris par les sculpteurs de cette maison teébò, et notamment par Gnõkithé Kambou, le fi ls de Magnuor, qui le remplacera dans la charge de thíteldárá kõtín. Il semblerait que Gnõkithé, né de mère lobi vers 1880 à Kèkó, ait été initié tout jeune à la sculpture par son père, Magnuor, qu’il devait épauler dans le travail des dernières années. Après la mort de Magnuor, Gnõkithé alla vivre avec son frère aîné à N’kpéion, près de Périgban, où il aurait poursuivi son expérience de sculpteur jusqu’à sa mort, vers 1950 / 1955. C’est au cours des dernières années de son existence qu’il exécuta, à la demande du chef des Kou, Bandouné Kambou, l’effi gie en l’honneur de Djotir Kambou, fi ls d’Ithé Dá (voir fi g. 3, statue 5). Le travail de continuité du style par Gnõkithé se révèle inégal. La statue qu’il réalise à la mémoire de Djotir Kambou rappelle fortement la confi guration de celles déjà présentes dans le thilduù, mais quelques variantes apparaissent, notamment dans la forme de la tête, bien plus ovale, et dans la manière de traiter les volumes, qui se ressent d’une vague infl uence lobi. Sous sa main, le style devient plus sec, la fi guration plus statique et stéréotypée. Cette allure rigide est renforcée par l’étirement des bras et l’allongement de la poitrine. Les traits du visage s’aplatissent encore plus, avec une dépression dans la partie inférieure de la face, mettant en relief les pommettes. Au regard de ces variantes stylistiques, il est possible d’envisager que celles-ci soient apparues après l’installation de cette famille de sculpteurs d’origine teébò dans une zone habitée en majorité par des familles lobi. Infl uencés par ces nouveaux rapports de voisinage, Gnõkithé et les siens auraient alors pris en compte des caractéristiques formelles plus locales, déterminant ainsi l’évolution « lobi » du style (voir fi g. 20). PAGE DE GAUCHE ET VUES CI-CONTRE FIG. 9 : Style de Holly Keko. Statue réalisée vers 1870 par le sculpteur Magnuor Palé (± 1830-± 1899). Bois dur gris et patine naturelle avec traces de libations. H. : 75 cm. Collection François et Marie Christiaens. © Hughes Dubois. FIG. 10 (CI-DESSOUS) : Vue d’une sculpture de style de Holly Keko. Statue réalisée par le sculpteur Bangité Sib (± 1910-± 1995). Don du sculpteur au musée du Poni de Gaoua. Gaoua, 1989. Photo : Daniela Bognolo. FIG. 11 : Journée d’entretiens avec le sculpteur Bangité Sib, son fi ls aîné à sa droite et Ontoré Kambou à sa gauche. Bagara, 1989. Photo : Daniela Bognolo.


T76Fr_internet
To see the actual publication please follow the link above