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PERSONNALITÉ 136 Liens spirituels : CHARLES DERBY, COLLECTIONNEUR Charles Derby a passé près de cinq décennies à acheter et à vendre de l’art tribal. Basé dans une petite ville de l’ouest du Massachusetts, il a constitué une collection majeure en faisant confiance à son oeil de chineur, plutôt qu’en se fournissant dans les hauts-lieux du marché de l’art. Notre directeur de publication a eu une discussion avec lui qui révèle son expertise et son enthousiasme contagieux. Tribal Art magazine : Vous êtes à la fois un spécialiste et un fervent collectionneur d’artefacts tribaux, qu’ils soient amérindiens, africains ou océaniens. Vous rappelezvous à quel moment précis vous en avez pris conscience ? Charles Derby : Environ quinze ans après que j’ai commencé à collectionner de l’art tribal, j’ai rencontré plusieurs de mes cousins aux funérailles d’un membre de la famille. Quand ils m’ont demandé ce que je faisais, j’ai répondu que j’étais collectionneur et ils n’ont pas semblé surpris par ma réponse. Ils se souvenaient de l’époque où ils venaient chez moi lorsque nous étions enfants. Ma chambre était remplie d’une multitude de choses – pierres, cartes de baseball, bandes dessinées, timbres, trains, et un tas d’autres objets. Après cette conversation avec eux, j’ai réalisé que même si les objets ont changé au fil du temps, j’ai toujours été un collectionneur. T. A. M. : Qui a été votre principale influence ? Vous étiez par exemple proche du célèbre collectionneur Paul Rabut. C. D. : Paul a été sans nul doute mon mentor et ma principale inspiration (pour plus de détails voir « The Mysterious World of Paul Rabut », dans Tribal Art nº33, hiver 2003). Mais il n’a pas été le seul à m’avoir influencé. Durant l’été 1968, j’ai fait par exemple une rencontre importante. Ma femme et moi nous baladions régulièrement à vélo dans les environs du cap Cod et de la côte sud du Massachusetts, souvent à la recherche de boutiques d’antiquités. Nous sommes ainsi rentrés dans celle de William Kranzler, à New Bedford, près du Whaling Museum. Elle était unique en son genre : jamais nous n’avions vu autant Propos recueillis par Alex Arthur d’objets tribaux en un seul et même lieu. Kranzler aimer dire qu’il avait pu se procurer bon nombre de ces objets auprès de personnes qui vidaient leurs greniers. Le premier objet que je lui ai acheté, une statue en bois d’une divinité chinoise, était caractéristique des pièces uniques présentes dans sa boutique. Sur le socle, on pouvait y lire l’inscription « ramenée vers le rivage de Hong Kong par un violent typhon, sept. 1819 ». Kranzler se montrait patient avec le collectionneur néophyte que j’étais et appréciait de répondre aux questions que je lui posais. Il n’y a pas seulement qui m’a influencé, mais également ce qui m’a influencé : j’ai grandi dans une ferme dans l’est du Massachusetts. J’ai passé une bonne partie de mon enfance à jouer et à travailler dans notre grange décrépite. J’étais entouré de bois pourri à divers stades de décomposition. Je ne m’en suis pas rendu compte à l’époque, mais le fait d’observer ce vieux bois dans la grange m’a aidé par la suite à déterminer l’âge et la fonction des objets d’art tribal en bois. T. A. M. : Vous avez un jour cité le nom de James Hooper. Qui était-il et pourquoi vous identifiez-vous à lui ? C. D. : James Hooper fut un collectionneur d’art tribal majeur, notamment d’art océanien du fait de son lieu de résidence (Angleterre) et de sa période d’activité (1920- 1960). Ma collection n’est pas aussi étendue que la sienne, mais je m’identifie à ses origines modestes. Il travaillait comme contrôleur des égouts ; mon père était ouvrier dans une usine et nous n’avions pas beaucoup d’argent. L’été, je travaillais comme fossoyeur pour pouvoir payer mes frais de scolarité. Tous les deux, nous avons dû développer notre propre expertise étant donné que nous achetions nos objets à des sources qui n’offraient aucune garantie. Quelques-unes de mes plus belles trouvailles proviennent de marchés aux puces, de vide-greniers et de petites ventes aux enchères. Quand vous dépensez l’argent que vous avez gagné à la sueur de votre front, vous devez absolument apprendre à distinguer le vrai du faux.


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