Page 155

XVII-4 Cover FR final_Cover

à un raffinement rigoureux du contour. Un ancien masque d’éléphant exceptionnel de la région des Grassfields trônant dans sa salle à manger en est le parfait exemple, tout comme un surprenant masque lega sans yeux dont il fit cadeau au Fowler. Des sculptures d’un tel raffinement ne laissent absolument aucune place à l’erreur. Comme il le dit : « Certaines personnes pensent qu’il est facile de créer un chef-d’oeuvre de forme simple. C’est faux. Mais une fois que vous le possédez, vous le savez. » Le marché de l’art dont ces pièces proviennent et les différentes personnalités qui en sont les acteurs sont presque aussi intéressants que les objets eux-mêmes. En un demi-siècle de collection, Jay a vu le marché évoluer et passer d’une source apparemment intarissable de matériel abordable dans les années 1960 et 1970 à la situation actuelle, où les excellentes pièces atteignent des prix si élevés qu’il faut faire preuve d’un sérieux engagement pour les acquérir. Selon lui, ce phénomène ne laisse plus beaucoup de place au plaisir. Les 1 500 dollars déboursés pour acheter sa Sakimatwematwe dans les années 1960 constituaient déjà une belle somme, mais ce n’est rien par rapport au montant de plus de deux millions auquel s’est vendu un autre exemplaire chez Sotheby’s il y a quelques années. Jay a acheté des pièces chez presque tous les marchands connus et chez certains dont vous n’avez probablement jamais entendu parler, et ses anecdotes concernant ses relations avec eux sont tour à tour enviables, amusantes, voire carrément choquantes. Le livre qu’il écrit actuellement à ce sujet en fera certainement sourciller plus d’un ! Jay n’est pas simplement un collectionneur ; il a réalisé depuis longtemps que les arts avaient besoin d’être soutenus. Lui et son épouse Deborah ont assuré une partie du financement nécessaire à la construction du bâtiment actuel du Fowler Museum, et, voici deux ans, ils ont doté le musée d’un poste de conservateur d’art africain. Outre le don de la collection lega au Fowler, Jay fait également don d’une autre collection majeure lui appartenant à la Huntington Library de San Marino en Californie : quelque cent quarante mille exemplaires de lithographie américaine. Tout n’est quand même pas aussi sérieux. Quand on connaît Jay, on se rend compte qu’un profond sens de l’humour et beaucoup de fantaisie se dissimulent derrière son air guindé. Bon nombre de ses objets africains ont quelque chose d’humoristique, mais c’est nettement plus évident dans sa collection de hiboux. Il y a quelques années, il a remarqué que les symboles binaires 010 formaient une abstraction des yeux et du bec d’un hibou. Depuis lors, il a acquis une multitude de statuettes de hiboux, qu’il s’agisse de chefs-d’oeuvre de la sculpture précolombienne ou d’objets outrageusement kitsch que ses amis lui ont achetés pour un dollar. Bien que cela puisse dérouter plus d’un collectionneur sérieux, il préfère de loin ces derniers. FIG. 17 : Masque éléphant. Région des Grassfields, Cameroun. Bois. L. : 47 cm. Photo : Scott McCue. FIG. 18 : Crête de danse, tsesah. Batcham, Grasslands, Cameroun. Bois. H. : 72 cm. Photo : Scott McCue.


XVII-4 Cover FR final_Cover
To see the actual publication please follow the link above