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I-IVCoverF_CoverF Vuvi

Masques vuvi de proie au clair de lune ou d’un papillon, la figure d’un ou de plusieurs ancêtres décédés. » (Neyt, 2010, p. 30). Le nez court et triangulaire se retrouve chez les Kwélé et les Tsogo qui ont également les mêmes sourcils arrondis, parfois doubles. Comme certains masques fang, tsogo et aduma, la plupart des masques vuvi ne présentent pas d’oreilles, à la différence des punu, tsengi et nzabi. La coiffure prend la forme d’un large bandeau arrondi où est accrochée 103 une parure végétale. Certains de ces masques présentent une bande rectangulaire colorée d’ocre qui s’étire de la bouche au menton symbolisant la barbe réservée aux dignitaires. Blanc, rouge et noir La couleur dominante des masques vuvi est blanche, constituée d’argile pemba et de poudre d’ossements : le blanc signifiant la pureté mais aussi le sperme, et l’os symbolisant la vision des ancêtres, mais également la lune, Ngondé, conçue ici en tant qu’entité et non simplement comme astre. Le masque blanc n’est pas uniformément blanc, car les sourcils, le nez et la bouche sont colorés de noir ou d’ocre rouge brun. D’autres masques sont couverts de couleur rouge au tsingo (poudre de padouk mélangée à de l’eau et à de l’huile de palme), symbole du sacré. C’est aussi la couleur des statues du Bwiti des Tsogo. Le rouge, c’est le sang (menstruel), la vie et la femme mais c’est aussi la référence à Kombé, le soleil selon Julien Bonhomme qui enquêta chez les Pové en 2001 et 2002 (2005, p. 131). L’association du blanc et du rouge symbolise le couple soleil/ lune, entités représentant ainsi les deux sexes. Le soleil évoque le père et l’autorité et la lune la divinité de la femme et sa puissance fécondante. On retrouve ces symboles cosmiques sur une porte de temple du Bwiti tsogo (musée du quai Branly, inv. 71.1964.38.1. et musée de Libreville, inv. 137-1 et 137-2). Ils sont largement répandus dans l’aire culturelle de l’Ogooué-Congo et sources d’innombrables mythes, légendes et cultes. Le symbolisme des couleurs est commun à tout le bassin de l’Ogooué avec l’association des trois couleurs, rouge, blanc et noir. La couleur est une nécessité symbolique plus fonctionnelle et circonstancielle qu’identitaire. Le masque peut être rouge à l’origine et poudré de kaolin pour une autre cérémonie. Les masques blancs sont beaucoup plus nombreux que les rouges. Un masque blanc peut être noirci pour la fonction de justicier. Les masques noirs, très rares, devaient être entreposés dans la brousse à l’abri des regards des Européens. Ils sont des représentations d’esprits « justiciers » et ne sont pas une variante. N’importe quel masque blanc ou rouge pouvait être noirci en vue de certains rituels morphologiques communs s’impose d’emblée, le style abstrait des masques vuvi ayant de grandes similitudes avec celui des masques tsogo, et parfois fang, ce qui expliquerait les erreurs d’attribution, les points d’interrogation et la double appellation vuvi-tsogo que l’on retrouve fréquemment. Il faut rappeler que « Les univers stylistiques ne sont pas fermés sur eux-mêmes …. Il est difficile de distinguer avec certitude les objets “tsogo” des objets sango dans la mesure où le plus souvent ces deux peuples sont en symbiose dans les mêmes villages. Au point que les Mitsogho empruntent couramment les masques ou objets sculptés de leurs voisins pour les intégrer directement dans leurs rituels ». (Perrois, 1982, p. 18 et 40), une remarque qui s’applique aux oeuvres vuvi également. Par exemple, un danseur portant un masque vuvi fut photographié par Pierre Amrouche à Mimongo, village tsogo (fig. 25-27). La stylistique S’il est malaisé de définir les constantes d’un style unique pour les Tsogo qui produisent, selon Pierre Sallée (1975, p. 89), « une diversité quasiment aberrante de formes et de types, parmi lesquels le masque blanc proprement dit n’est qu’un cas particulier », en revanche, les Vuvi produisent des masques aux « faces presque planes, sur lesquelles deux arcs de cercle réunis par un appendice triangulaire (évoquant une fleur de lys stylisée ou un oméga renversé), figurent la ligne des sourcils et le nez ». Le style vuvi se caractérise par l’ensemble formé par des sourcils longs et recourbés, des yeux étirés vers les tempes ou rapprochés, un nez court triangulaire, conique ou rectangulaire, une bouche toujours ouverte montrant parfois des dents qui s’inscrivent dans un visage en forme de coeur. « Telle est l’empreinte séculaire de la vision des milieux forestiers, récapitulant les signes d’un faciès … d’un oiseau PAGE PRECEDENTE FIG. 18 : Masque, Vuvi, Gabon. H. : 32 cm Provenance : Hélène et Philippe Leloup. Collection privée, Paris. Photo © Michel Gurfinkel Publié dans Perrois, 1988, p. 4. FIG. 19 : Masque, Vuvi, Gabon. H. : 31 cm Ex. coll. : Docteur Jean-Claude Andrault. Collection privée. Reproduit avec l’aimable autorisation de Lin et Emile Deletaille. Publié dans Musée de la Castre, 1990, p. 39, cat. 99 ; The world of Tribal Arts, Printemps 2001, n° 25, deuxième de couverture. FIG. 20 : Masque, Vuvi, Gabon. H. : 27 cm. Collection privée. Récolté sur une piste de forestiers au début des années 1970, à 50 km au nord de Malinga (Sud du Gabon). FIG. 21 : Masque, Vuvi, Gabon. Ex. coll. : Han Coray. Numéro de collection à l’intérieur du masque : HC 302. Localisation actuelle inconnue. Reproduction tirée de Arts primitifs, Guy Loudmer, 10 décembre 1990, lot 299. Avec l’aimable autorisation de Guy Loudmer. FIG. 22 et 23 (CI-DESSUS) : Masques, Vuvi, Gabon. Collection des Spiritains dite « collection Mortain », inv. M. 10 (à gauche) et M. 24 (à droite). Avec l’aimable autorisation des pères Spiritains. Collectés avant 1930 et présentés au Pavillon des Missions de l’exposition coloniale internationale de 1931 à Paris.


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