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croissance, il était essentiel que les dirigeants entretiennent
des relations fructueuses avec leurs dieux,
et ces relations étaient renouvelées périodiquement
à travers des rites appropriés. Les saisons de
croissance étaient gouvernées par les étoiles et, en
particulier, par l’ascension et le déclin cycliques de
l’amas d’étoiles des Pléiades. L’apparition à l’horizon,
chaque mois de novembre, de ces sept étoiles
connues sous le nom de Makali’i ou « Les yeux des
dieux » marquait le début de Makahiki, une fête qui
célébrait le dieu Lono et l’arrivée des pluies. Leur
visibilité était un signe favorable de la présence des
dieux ancestraux, signe d’une saison abondante et
prospère à venir. Les dieux, les chefs et le monde
naturel étaient étroitement liés en Polynésie et plus
particulièrement à Hawaï, où la généalogie était
primordiale. Un chef de haut rang n’était pas simplement
un agent des dieux, mais leur homologue
terrestre. Armés de couteaux en dents de requin (fig.
9), d’éventails de fibres (fig. 8), et enveloppés dans
de spectaculaires capes de plumes, la classe d’élite
des chefs hawaïens (ali’i) a manifesté sa prétention à
un leadership légitime. En rassemblant les forces du
monde naturel de manière visuellement dynamique,
ils ont renforcé leur efficacité spirituelle et exprimé
leur étroite parenté avec l’environnement.
Pour les Hawaïens, Wakea (Tonga :
Vatea ; Tahiti : Atea) est comprise comme
la force créatrice et la source de toute vie,
mais son nom dérive de ce même sens
d’expansion et de lumière, atea, qui est
le titre et le cadre de l’exposition. Le
terme évoque l’immensité, une notion
d’expansion, comprises comme des qualités
cruciales par rapport à un état sacré,
ou tapu. Dans les tout premiers récits des
origines, des Hawaïens racontent comment
Wakea, le géniteur de toute vie à
Hawaï, recueillit la peau extérieure d’une
courge pour créer la première sphère du
ciel. Jetant la pulpe dans les airs, il forgea
le soleil. Les graines devinrent les
étoiles, la chair mûre de la courge les
nuages, et son jus succulent la pluie.
Cette oeuvre finale de l’installation, une courge
immaculée, peinte de délicats motifs linéaires
qui balaient délicatement sa surface, traçant la
montée et la descente de ses contours, témoigne
précisément du rapport qui existe entre la nature
et la divinité.
PAGE DE GAUCHE
FIG. 12 (À GAUCHE) :
Dieu-bâton to’o. Rurutu, îles
Australes. XVIIIe siècle.
Bois. L. : 55 cm.
Collection privée, The Menil Collection,
Houston.
FIG. 13 (À DROITE) :
Pendentif. Hawaï. XVIIIe -
XIXe siècle.
Ivoire de baleine. H. : 6 cm.
The Michael C. Rockefeller Memorial
Collection, legs de Nelson A.
Rockefeller, 1979, inv. 1979.206.1587.
FIG. 14 (CI-DESSOUS) :
Chasse-mouches tahiri
(détail). Îles Australes.
Première moitié du XIXe
siècle.
Bois, fibres et cheveux humains.
L. : 81,3 cm.
The Michael C. Rockefeller Memorial
Collection, legs de Nelson A.
Rockefeller, 1979, inv. 1979.206.1487.
FIG. 15 (À DROITE) :
Dieu-bâton. Rarotonga, îles
Cook. Fin XVIIIe - XIXe siècle.
Bois. H. : 85,1 cm.
Collection Gordon Sze.
ATEA