MUSÉE À LA UNE
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ces oeuvres, avec des exemples connus de sculptures
fi guratives en bois et en ivoire de baleine, des coiffes
et manteaux de plumes superbement exécutés et du
travail sur fi bre remarquable, comme des étoffes
d’écorce peinte et une maison des esprits destinée
à un dieu. Ces oeuvres complexes mettent en
évidence le lien vital entre la nature et le divin, en
soulignant la manière dont les élites polynésiennes
ont canalisé stratégiquement sa puissance effective
pour renforcer leur propre effi cacité spirituelle.
Dans toute la Polynésie, les récits des origines
relatent la création de l’univers comme une nuit
profonde, longue et sans fi n, aux pulsations régulières.
Les ténèbres se répandent doucement depuis
toujours jusqu’à ce que l’espace commence à se
creuser, laissant pénétrer la lumière. L’exposition
célèbre ce moment puissant – l’équivalent cosmologique
polynésien du Big Bang –, lorsque l’espace
et la lumière (atea) inondèrent la sombre nuit ancestrale,
initiant une nouvelle ère dynamique dans
laquelle des chaînes d’îles furent vigoureusement
appelées à naître, et qu’advint la première génération
de dieux. Ancrée dans un cadre spécifi quement
polynésien, l’exposition propose une suite
d’oeuvres d’art remarquables qui mettent en valeur
cet aspect profond de la divinité (atea) et explore la
relation dynamique entre la nature et le divin. En
Polynésie, des artefacts rituels ont été créés principalement
pour des chefs puissants, descendants
de ces dieux. En tant que dirigeants politiques et
religieux, ils étaient investis de l’essence spirituelle
FIG. 4 (À DROITE) :
Temple portable
bure kalou. Fidji.
Début du XIXe siècle.
Fibres de coco, bois et
coquillages. H. : 112 cm.
Peabody Essex Museum,
Salem, MA, inv. E5037.
FIG. 5 (EN BAS) :
Coiffe de plumes.
Îles Australes.
XVIIIe siècle.
Plumes, coquillages, cheveux
humains, fi bres de coco, fi bres
végétales. H. : 110 cm.
Peabody Museum of
Archaeology and Ethnology,
Harvard University
Don des héritiers de David
Kimball, 1899, inv. 99-12-
70/53617.
moyen de se connecter au royaume ancestral des
dieux, une série spécifi que de crêtes, ressemblant
à des plantes, se projetant depuis l’épine dorsale
et le front, formant un arc spectaculaire au-dessus
de la tête. Ces saisissants étages dans la coiffe de la
sculpture évoquent chaque étape de la fl oraison dynamique
de l’univers. Lorsqu’elle était activée dans
un rituel, la sculpture agissait comme un lien puissant
entre la voûte du ciel, où résidaient les dieux,
et le domaine terrestre des humains en dessous.
Atea célébre, à partir d’une trentaine d’oeuvres
exceptionnelles, l’ingéniosité créative des artistes
polynésiens, qui ont recherché dans le monde
naturel les éléments pour exprimer leur idée de la
divinité. Montée à partir de collections américaines
ainsi que des propres collections du Met, l’exposition
met en avant l’extraordinaire matérialité de