ÉPÉES INDIENNES
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PAGE DE GAUCHE, EN BAS
FIG. 31 (À GAUCHE) :
Demeure du chef Red
Cloud, par Clarence Grant
Morledge.
Réserve de Pine Ridge,
Dakota du Sud. 1890 ou
1891.
Voir la fi g. 1 pour les détails.
FIG. 32 (À DROITE) :
Chambre du chef Red
Cloud, par Clarence Grant
Morledge.
Réserve de Pine Ridge,
Dakota du Sud. 1891.
À partir d’un négatif sur plaque de
verre. 13 x 21 cm.
No du négatif de Morledge : 1540/143.
Ex-Louise Stegner, Omaha, Nebraska,
1951.
Collection de la Denver Public Library,
référence X-31433.
Une autre photo de la chambre de Red
Cloud dans la réserve de Pine Ridge,
prise après le massacre de Wounded
Knee. Comparée à la fi gure 1, on
dénombre davantage de drapeaux
américains sur le mur ainsi que
d’autres objets aperçus sur la photo
plus ancienne. Le katana n’est par
contre plus visible.
FIG. 33 (CI-CONTRE) :
Demeure du chef Red Cloud,
par William R. Cross.
Réserve de Pine Ridge,
Dakota du Sud. Vers 1891.
À partir d’une copie de négatif en noir
et blanc. 4 x 5”.
Library of Congress Prints and
Photographs Division Washington,
D.C., référence LOT 12756.
Vue extérieure de la cabane de Red
Cloud dans la réserve de Pine Ridge
avec Red Cloud, Pretty Owl et une
autre femme se tenant debout devant
la maison. Pretty Owl semble porter la
couverture Navajo vue sur la fi gure 1.
transformée en peinture. Combinez ces éléments
avec le peintre des Amérindiens le plus populaire,
George Catlin, et vous obtenez une nouvelle histoire.
Hartley et Buttweiler ont bien tenté de vérifi er
ces références obscures à une prétendue peinture de
Catlin, mais faute d’avoir identifi é cette dernière, ils
ont simplement transmis aux lecteurs l’information
telle qu’ils l’avaient reçue. La publication non paginée
de Hartley et Buttweiler, réalisée par un club
de collectionneurs de sabres japonais de Californie,
contient cependant de précieuses informations historiques
et techniques introuvables ailleurs et avance
également de nombreuses pistes pour des recherches
plus approfondies. Si la peinture de Catlin illustrant
l’intérieur d’un tipi sioux avec un sabre japonais
accroché à l’un des mâts était un jour localisée, cela
représenterait une découverte artistique et historique
majeure. Dès lors, nous qui venons de suggérer
qu’elle n’existe probablement pas, nous serions ravis
de nous être trompés.
CONCLUSIONS SUR LE KATANA DE DOG
CHILD
Des questions identiques de provenance, d’usage et
de localisation ultérieure entourent le seul autre cas
connu de sabre de samouraï japonais en possession
d’un Amérindien des Plaines du Nord au XIXe siècle,
à savoir celui de Dog Child, également connu sous le
nom de Winnipeg Jack (fi g. 2 et 35).
Nation autochtone fi ère et farouchement indépendante
de chasseurs de bisons, comme d’autres tribus
des grandes Plaines du Nord pendant la période
historique, les Blackfeet ont grandement bénéfi cié
de l’acquisition de chevaux et de fusils, développant
une structure militaire puissante et élaborée21.
En outre, comme d’autres Amérindiens, les anciens
Blackfeet accordaient une grande valeur aux « longs
couteaux » étincelants et tranchants euro-américains,
qu’ils utilisaient comme armes et symboles de
statut (fi g. 35)22.
Comme dans le cas de Red Cloud, on ignore tout
de la provenance exacte du katana et des circonstances
qui ont conduit le sabre entre les mains de Dog
Child. La photo intrigante d’un Blackfoot tenant un
katana sorti de son fourreau a été commentée par
écrit pour la première fois par Daryl W. Drew dans
un court article intitulé « Dog Child and the Samurai
Sword (Drew 1980) »23. Le katana de Dog Child a
fait l’objet d’une autre analyse quelques années après
l’article de Drew, par Peter Bleed. Selon lui, le sabre
japonais de Winnipeg Jack était peut-être un cadeau
du missionnaire d’origine britannique Harry William
Gibbon Stocken et de son épouse, qui avaient
tous deux séjourné au Japon24. Bleed reconnaît «
qu’il n’y a aucune preuve, mais qu’il est tentant de
s’interroger sur le rôle du révérend Stocken et de son
épouse dans l’arrivée du sabre de Dog Child dans le
Nouveau Monde » (Bleed 1987 : 115). Malheureusement,
l’autobiographie de Stocken (Stocken 1976)
revenant sur son travail parmi les Sarsi de 1885 à
1892 (avec sa première épouse) et les Blackfeet de
1895 à 1906 (avec sa deuxième épouse), puis seul
jusqu’à sa retraite en 1923, ne mentionne ni l’épée
de samouraï ni Dog Child ou Winnipeg Jack. L’un
des auteurs du présent article, Cesare Marino, a
également mené des investigations approfondies au
Canada auprès des descendants de Dog Child, mais
aucun d’eux n’était en possession du sabre ni même
d’informations complémentaires à son sujet.
À la lumière de cette nouvelle analyse des deux
sabres japonais identifi és dans les Grandes Plaines du
Nord dans les années 1890, nous pouvons conclure
qu’ils semblent être arrivés dans cette région via des
sources n’ayant aucun lien entre elles. En outre, ces
deux katanas avaient visiblement été incorporés au
cadre d’interprétation de l’épée, cet objet du patrimoine
matériel des Amérindiens, fabriqué à l’étranger,
mais à cette époque totalement « indigénisé ».
Les auteurs remercient Jonathan Fogel de Tribal Art
magazine pour son assistance professionnelle et son aide
dans le cadre de la rédaction de cet article. Ils remercient
également l’ancienne archiviste de la Smithsonian,
Paula Fleming, et sont reconnaissants du soutien du
Smithsonian’s Mary E. Maxwell Fund. Les travaux de
recherche du Dr Pontsioen ont été favorisés par une
bourse d’étude japonaise de longue durée octroyée par la
Japan Foundation.