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Leurs traits fi gés, le regard
creux et la bouche béante pris
dans le lent balancement de la
danse confèrent à l’ensemble un
caractère hiératique, qui fait sortir
la divination des activités journalières,
transcende l’humain, tout en y
intégrant l’environnement naturel
et animal.
Une fois de plus il nous est
donné ici de saisir la différence de
perspective. Alors que l’approche
rationnelle, qui souvent est la
nôtre, cherche à rendre le sens
des choses en les enfermant chacune
symbolique élargit tant qu’elle
peut le champ des références
signifi catives de sorte à intégrer
l’objet qui se présente à elle dans
tout un système de ramifi cations
signifi antes et à faire de ce dernier
un ensemble aussi cohérent que
possible. L’effi cacité symbolique
résulte précisément de cet élargissement intégratif.
La divination fait partie de cette lutte constante
contre le mal, contre tout ce qui est destructif sur
le plan personnel et communautaire, cette lutte qui
constitue l’élément dynamisant de tout le rituel
OUGANDA
RWANDA
BURUNDI
Lac
Albert
REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE
DU CONGO
FIG. 21 (CI-DESSUS) :
Masque Komo.
Bois et pigments. H. : 30 cm.
Collection privée.
Photo : Bernard De Keyser.
été ou pourraient être ensorcelés.
Ces objets sont effectivement
censés se trouver à même le sol,
là où l’on passe fréquemment et
où ils peuvent s’accrocher à ceux
qui les enjambent.
Malgré son évidence, corroborée
d’ailleurs par une séquence
analogue du rituel de la circoncision
auquel celui de l’initiation
à l’art divinatoire a emprunté
de nombreux éléments7, les dirigeants
de ce dernier avaient apparemment
de la peine à confi rmer
cette interprétation. Mais
ils n’arrivaient pas non plus à en
présenter une autre. Ils étaient
plutôt d’avis qu’il n’y avait pas
lieu d’y chercher quelque signifi
cation particulière. Comme on
sait, l’exégèse symbolique reste
souvent en retrait par rapport
à l’analyse. Toutefois, si l’on
prend au sérieux la remarque des
dirigeants, il faut peut-être se demander
s’il n’y a pas autre chose
qui est en jeu. Effectivement. En nous fi xant sur
ce qui se passe durant la danse, nous risquons de
laisser hors considération la présence des masques.
Or ce sont eux qui constituent l’élément principal
de la scène.
et la relie à ce monde qui
dans une équation aussi univoque
que possible, l’approche
FIG. 22 (À GAUCHE) : Carte
de l’aire komo, RDC.
© Tribal Art magazine.
FIG. 23 (PAGE DE DROITE,
À GAUCHE) : Henri Kerels
(1896-1956), La danse des
sorciers. 1929.
Huile sur toile, 62 x 50 cm.
© Photo Alain Weill, artiste soumis
au droit d’auteur (non répertorié à
l’ADAGP).
FIG. 24 (PAGE DE DROITE, À
DROITE) : Vue de détail d’un
masque komo, RDC.
DOSSIER
Lac
Edward
Lac
Kivu
Lac
Tanganyika