premier de la divination est précisément de mettre
à nu tout ce qui peut constituer une menace pour
l’entente sociale.
Comme les membres de la famille d’Abálambú
le prenaient pour un fou, il ne voulut enseigner la
divination à aucun des siens. Seul Likóndó, son
beau-fi ls, du clan Okaƃe, croyait en son art et fut
initié par ses soins. Il devint son successeur offi ciel
et c’est lui qui, à son tour, forma d’autres adeptes.
C’est ainsi que sous Likóndó et ses successeurs, la
divination se développa et s’organisa en une véritable
86
confrérie, celle des ƃabánkunda, tandis que
ses formes antérieures, qui n’étaient pratiquées que
par des individus, perdirent une grande partie de
leur prestige. Plus tard, des personnes du clan Obúsé
furent également initiées. C’est ainsi que si, durant
notre séjour dans la région, Angoní, un devin
de ce clan, qui habite au kilomètre soixante-seize
sur la route d’Ituri, est considéré comme le successeur
légitime d’Abálambú, toute l’organisation de
la fonction reste entre les mains des membres du
clan Okaƃe, et plus particulièrement de la lignée
de Kεnεngɔa.
Likóndó lui-même était de la lignée de Nsɔmƃei,
mais après que l’unique petit-fi ls de celui-ci se fût
converti au protestantisme, la direction de la fonction
passa à la lignée de Kεnεngɔa qui s’était fi xée,
en partie du moins, au kilomètre soixznte-douze
sur la route d’Ituri. L’autre partie est restée habiter
à Mpέnέluta, un village situé à quarante kilomètres
au nord de Lubutu, où un arrière-petit-fi ls
de Likóndó, Musibule, résidait encore quand nous
étions sur place. Selon les anciens qui l’ont encore
connu dans leur jeunesse, Likóndó lui-même serait
mort dans les années 1910-1920. Abálambú doit
donc avoir vécu au cours de la seconde moitié du
siècle qui précède.
Deux remarques importantes peuvent être déduites
de ces données. Tout d’abord, l’utilisation
de masques dans la culture Komo est relativement
récente et, en deuxième lieu, ces masques furent
introduits à partir d’une région plutôt
périphérique, le nord-est notamment du
territoire peuplé par les Komo, là précisément
où passe la limite qui les sépare
des Lombi.
CE QUE REPRÉSENTE LE MASQUE
La paire de masques n’est exhibée qu’à
l’occasion de rencontres rituelles importantes,
notamment lorsqu’un initié est
confi rmé offi ciellement dans ses nouvelles
fonctions ou lorsque, en souvenir
d’un devin décédé, l’ensemble des rites
est de nouveau célébré en son honneur
(ƃokúa). Toutefois, cette commémoration
va généralement de pair avec une
nouvelle initiation.
Tout devin n’est pas en possession
des masques nsembú. Le sont uniquement
ceux qui, parce qu’ils remontent
par fi liation à l’un des premiers initiés,
jouent un rôle de premier plan dans la confrérie.
C’est ainsi que les masques, avec les vêtements
en écorce (nsɔkɔ) dont se recouvrent ceux qui les
portent durant la danse, sont transportés d’un
village à l’autre. Pour ce, celui qui les possède les
confi e à un jeune homme de sa famille qui, l’aprèsmidi
qui précède l’investiture, doit les amener au
village où auront lieu les rites et où les dirigeants
de la confrérie se sont déjà rassemblés. L’ensemble
est bien enveloppé car en dehors de leur apparition
rituelle, les masques ne peuvent être vus par aucun
des non-initiés.
De manière générale les masques sont appelés à
personnifi er l’esprit de la divination, et à marquer
par là la distance entre la fonction et toute entreprise
purement humaine. C’est pourquoi ils ne sont
pas mis en rapport avec les personnages ou les êtres
DOSSIER
FIG. 4 (CI-DESSOUS) :
« Danseurs du Nkunda »
Photo extraite de Moeller, A., 1936,
Les grandes lignes des migrations des
Bantous de la Province Orientale,
Mémoires de l’Institut Royal Colonial
Belge. Tome VI, Bruxelles. Planche non
numérotée.
© MRAC , EP.0.0.7083, Tervuren.
FIG. 5 (PAGE DE DROITE,
À GAUCHE) : « Masques
d’initiation chez les
Bakomo »
Extrait de Huet, M. & Delmarcelle, R.,
1958, Congo, Offi ce International de
Librairie, Bruxelles. P.132.
© MRAC , EP.0.0.3404, Tervuren.
FIG. 6 : (PAGE DE DROITE) :
Vue de détail du masque
komo en fi gure 21.
Collection privée.
Archives Tribal Art magazine.