celle-ci existent dans le Groupe Angle, elles sont bien
plus fréquentes dans le Groupe Double. Ces recoupements
106
en matière d’approches de la composition,
ainsi que les différentes techniques évoquées ci-dessus,
indiquent une méthode de production corporative
caractéristique.
PRODUCTION
Le recours au moyen et haut-relief dans le Groupe
Angle et le Groupe Double est non seulement lié
au style, mais est également le fruit d’une prouesse
technique. L’anthropologue Philip Dark a été le premier
à suggérer que les plaques en haut-relief les
plus complexes sur le plan technique sont les plus
tardives.6 Si nos découvertes concernant les tailles,
les compositions et les motifs ornementaux au sein
des trois groupes de rebords identifi és viennent
étayer la théorie de Dark, elles permettent également
de remettre en cause la période de production
avancée par l’anthropologue, qui couvrirait plus
d’un siècle. La production corporative laisse penser
que les plaques ont été fabriquées sur une période
de seulement trente-cinq à quarante ans. Selon cette
hypothèse, le Groupe Courbe a été créé en premier
lieu. Ensuite, la même corporation d’artistes a doté
les plaques du rebord à angle. Les Groupes Courbe
et Angle comprennent tous deux des éléments saillants
et une ornementation standard ajoutés au répertoire
des techniques utilisées par la corporation
des mouleurs de laiton vers la fi n de la période de
production du Groupe Courbe. Nous pensons que
le Groupe Double a quant à lui été produit par certains
artistes à l’origine du Groupe Angle, et que la
maîtrise supérieure de l’expression narrative dans
le Groupe Double modifi e radicalement la fi nalité
des oeuvres du corpus, une question sur laquelle
nous reviendrons plus loin. Cette théorie repose sur
la confi ance accrue dans les possibilités techniques
offertes par le support, ainsi que sur l’accentuation
de l’idée de mouvement et de qualités narratives, que
l’on retrouve dans les oeuvres du Groupe Double.
Les saillies perpendiculaires constituent la meilleure
méthode pour créer des détails en haut-relief.
Nous les défi nissons ici comme des éléments de la
composition soutenus par une partie de la forme
principale, par exemple un avant-bras saillant soutenu
par la partie supérieure du bras qui, elle, est fi xée
à la plaque. La fi gure 8 décrite plus haut, qui représente
un courtisan jouant du tambour et ses auxiliaires
frappant chacun un double gong, illustre bien
le concept de support perpendiculaire. Le Groupe
Courbe se compose de huit plaques présentant ce
type de support (soit 7,7 % du groupe). En revanche,
ces supports sont utilisés dans vingt-huit pour cent
des plaques du Groupe Angle, ce qui laisse penser
que cette technique innovante était déjà bien avancée
au moment de l’apparition du Groupe Angle.
Les saillies soutenues par des étais révèlent un
schéma similaire, avec une hausse de la proportion
du Groupe Courbe au Groupe Double. Le Groupe
Courbe ne comprend que six plaques de ce genre
(5,8 %), où l’artiste a utilisé des étais pour supporter
un mince élément saillant, comme une épée ou
une lance. Parmi les plaques du Groupe Angle, dixhuit
pour-cent possèdent des étais destinés à soutenir
un élément saillant. La plaque illustrant les deux
courtisans brandissant leur épée eben (fi g. 12) est un
exemple typique de l’usage d’étais. Une vue détaillée
de l’une des parties latérales de la plaque montre
clairement la technique utilisée (fi g. 15).
La fréquence et l’utilisation des saillies perpendiculaires
et des étais au sein du corpus sont une
autre preuve de l’antériorité du Groupe Courbe,
des probables recoupements avec le Groupe Angle,
et de l’apparition ultérieure du Groupe Double. Ces
techniques ne se retrouvent que dans une minorité de
plaques du Groupe Courbe (13,5 %), tandis qu’elles
apparaissent dans un tiers (34 %) des plaques du
Groupe Angle et dans la majorité des oeuvres du
Groupe Double.7 (62 %). Les Groupes Courbe et
Angle ne comprennent généralement qu’une seule
de ces techniques de support pour chaque plaque.
À l’époque de production du Groupe Double, les
artistes ont toutefois utilisé fréquemment les deux
techniques (supports perpendiculaires et étais) sur la
même plaque. L’évolution des techniques de support
des éléments saillants témoigne clairement de l’amélioration
des compétences techniques, ce qui indique
que les plaques les plus avancées techniquement ont
vraisemblablement été fabriquées plus tard qu’on ne
le croit aujourd’hui.
L’Ineh n’Igun Eronmwon, le chef des mouleurs
de laiton, était chargé de contrôler l’exécution des
commandes de l’oba et de former les apprentis.8 Ce
titre se transmet de père en fi ls.9 Le moulage du laiton
s’effectuait anciennement au sein même du palais,10
sous la supervision de l’oba, endossant le rôle cérémonial
de mouleur en chef pendant la fabrication
d’objets destinés à garnir l’autel commémoratif de
son père.11 En raison de la fragilité des formes en cire,
DOSSIER
FIG. 13 (À DROITE) : Plaque
à motifs doubles fi gurant un
jeune offi cier de cour. Bénin,
Nigeria. XVIe siècle.
Alliage cuivreux. H. : 46,4 cm.
Museum of Fine Arts, Boston, Robert
Owen Lehman Collection,
inv. L-G 7.24.2012.
© 2017 Museum of Fine Arts, Boston.